Neuf personnes ont été placées en garde à vue dans les locaux de la police judiciaire de Nice après l’enlèvement spectaculaire de Jacqueline Veyrac, en plein centre-ville, par des hommes cagoulés. La riche veuve de 76 ans, propriétaire du Grand Hôtel, un palace réputé sur la Croisette à Cannes, avait été retrouvée, mercredi, saine et sauve après 48 heures de séquestration.
C'est un habitant du quartier Saquier, dans la périphérie de Nice, qui, intrigué par la plaque d'immatriculation défectueuse d'un utilitaire blanc, a aperçu la septuagénaire ligotée à l'arrière du véhicule. Elle a ainsi pu être libérée. Cet heureux dénouement ne constitue pas la fin de l'«affaire Veyrac». Bien au contraire, les enquêteurs doivent à présent résoudre ces épineuses questions : qui a organisé le kidnapping rocambolesque ? Quel est le mobile ? Ils disposent du récit des deux jours de captivité de la veuve mais misent aussi sur «des moyens techniques qui devraient apporter des résultats très bientôt», comme l'a souligné Jean-Michel Prêtre, le procureur de la République de Nice qui a ouvert une enquête pour «enlèvement et séquestration en bande organisée».
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Pour le moment peu de détails filtrent sur l'identité des ravisseurs présumés afin de ne pas comprommettre la suite des investigations. Lors de sa conférence de presse de mercredi soir, après les premières interpellations, le procureur a simplement exhorté à la prudence : «Il n'est pas évident que les exécutants soient les mêmes que les commanditaires. Il convient dans cette enquête que le tri puisse être fait .» Il semble tout de même qu'une piste soit privilégiée dans cette affaire «complexe», «mystérieuse» et «exceptionnelle».
C'est La Réserve, un restaurant chic situé en bord de mer à Nice, appartenant à la veuve, qui serait au cœur de l'histoire. D'après le Parisien, l'ancien gérant-locataire, un certain Giuseppe S. natif de Turin, a connu une liquidation judiciaire en 2009 dont il a gardé une vive rancune. Le kidnapping de la veuve Veyrac pourrait alors se lire comme une vengeance. L'enquête devra confirmer si ce suspect est bien le commanditaire du rapt. Est-il, en outre, l'homme qui a passé ce coup de fil quelques heures après l'enlèvement au fils de Jacqueline Veyrac ? Dans un anglais de mauvaise facture, un interlocuteur mystère l'avait menacé : «Vous avez des problèmes, vous allez devoir payer.»
Parmi les autres personnes gardées à vue se trouve un paparazzi surnommé «Tintin», spécialisé dans les clichés de star. L'homme reconverti en détective privé aurait assuré les filatures et photographié la millionnaire depuis plusieurs semaines afin de connaître le planning de ses rendez-vous, selon RTL. Si l'on résume, l'affaire réunirait donc un commanditaire présumé au masque vengeur, un paparazzi qui joue les Sherlock Holmes et des hommes de main cagoulés ne redoutant pas d'agir en plein jour.
Ce drôle d'attelage apparaît tout de même «parfaitement organisée» selon le procureur. «Nous ne pouvons négliger aucune piste, alors on travaille dans toutes les directions. La difficulté est de comprendre l'articulation de cette équipe», a confié un enquêteur à Nice Matin. Me Sophie Jonquet, avocate des enfants de la veuve, a de son côté indiqué par communiqué que «la famille Veyrac n'entendait faire aucune déclaration sur les faits douloureux auxquels elle a dû faire face». La femme d'affaires avait déjà failli être enlevée de la même manière près de chez elle en 2013, mais aucun lien formel entre ces deux affaires n'a pour l'instant été établi.