A coup sûr, la police a de bons motifs pour se plaindre. Sollicitée plus qu’à son tour par l’irruption d’un terrorisme à la violence décuplée, astreinte à des tâches ingrates, comme les gardes statiques, vivant avec le risque physique face à des criminels armés, dotée d’un matériel que les contraintes budgétaires empêchent de renouveler assez vite, elle présente souvent des revendications légitimes. Et l’opinion qui s’en plaint volontiers ne manque pas de l’applaudir quand elle s’oppose courageusement aux menées des tueurs ou de réclamer sa présence dans les points sensibles pour se rassurer. A-t-elle pour autant raison d’accuser la justice ? L’entretien approfondi que nous publions montre que l’affaire est nuancée. Bien plus, en tout cas, que les simplifications servies par la droite ou l’extrême droite à des fins de démagogie électorale. Laxiste, la justice ? Il n’y a jamais eu autant de personnes emprisonnées en France. Et l’élargissement choquant de certains criminels ne tient pas, la plupart du temps, à un manque coupable de fermeté, mais bien à la lenteur des procédures imposée par le manque de moyens dont souffre la magistrature. Le manque de respect ? Il est très condamnable quand il procède d’un préjugé antédiluvien selon lequel toute sanction est suspecte. Mais il suppose en retour une police fermement arrimée, au jour le jour, à la morale républicaine, qu’il s’agisse de ses moyens de lutte, contestables, de sa neutralité politique, parfois déficiente, et, surtout, de son rapport à la population. Une police «de contact», qui ressuscite la «police de proximité» abolie naguère ; une police qui symbolise le respect de la loi et donc se l’applique d’abord à elle-même : sans ces deux conditions élémentaires, le malentendu subsistera.
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