Menu
Libération
Présidentielle

Débat de la primaire de droite : les limites d’un format

L’émission a fait la part belle aux attaques personnelles plus qu’au débat d’idées. Une limite inhérente au format du programme ainsi qu’à la relative proximité des candidats.

Alain Juppé et Nicolas Sarkozy lors du débat du 3 novembre. (Photo Albert Facelly pour Libération)
Publié le 04/11/2016 à 13h08

«Alain Juppé, sur l'éducation, une minute.» Derrière son pupitre, le favori de la primaire de droite soupire. Devant notre écran, on s'interroge. Indéniablement, le deuxième débat de la primaire de droite aura été plus agréable à suivre que la première édition, trois semaines plus tôt. Moins crispés, les candidats ont plus facilement usé de leur droit d'interpellation, produisant une soirée riche de ces «petites phrases» pas toujours si anodines. Mais le débat s'est heurté à la même limite que la première édition, le 13 octobre : faire cohabiter pas moins de sept personnalités sur le même plateau et attendre d'eux qu'ils développent, en moins de quinze minutes chacun, une réflexion articulée sur plusieurs sujets fondamentaux. La soirée d'hier l'a confirmé : c'est impossible.

Contraints par le chronomètre, fréquemment interrompus, les candidats n'ont guère eu le temps de développer leur propos. Ils n'ont pas été aidés par les animateurs de la soirée, qui ont choisi de consacrer près d'un quart d'heure à la polémique François Bayrou, lancée par le camp Sarkozy, avant de presser le pas sur la question scolaire. Peu propice au débat d'idées, le format se prêtait en revanche à merveille aux petites méchancetés réciproques. C'est ce qu'en ont d'abord retenu les observateurs, comme en témoignent de nombreux articles publiés dans la foulée, y compris dans Libération : «Les clashs du débat», «Enfin un peu de castagne», «Les 35 piques que les candidats se sont envoyés un peu à la figure»… De quoi fournir une belle matière à ceux qui, notamment au FN, voient dans ces débats le triomphe de la politique-spectacle, un show «à l'américaine» dont les couleurs chatoyantes habilleraient le vide.

Combativité

On n'est pas obligé de partager cette analyse, issue d'une vision idéalisée (et parfois peu sincère) du débat public. Un politique se jauge aussi à sa combativité, son sens de la repartie ou son sang-froid face aux attaques. Ce type d'échanges peut être aussi déterminant que le débat d'idées et, du «monopole du cœur» au «moi, président», laisse parfois plus de traces que celui-ci. Il existe par ailleurs d'autres programmes dans lesquels un candidat peut exposer plus en détail sa vision de la société, comme L'émission politique de France 2.

La soirée d’hier ouvre toutefois sur un double questionnement. Sur cette primaire elle-même, où le relatif accord des candidats sur les sujets de fond laisse une large place au choc des personnalités. Et sur le format de l’émission, dont il ne faut sans doute pas attendre ce qu’il ne peut pas donner. Les débats à sept de la primaire de droite ne sont pas le lieu du débat d’idées – et peut-être, d’ailleurs, n’est-ce pas cela que nous cherchons en les regardant.