A 47 ans, l’homme du renouveau n’est plus si jeune. De Matteo Renzi à Justin Trudeau, en passant par James Cameron, de nombreux leaders occidentaux étaient déjà, à cet âge, au sommet de leur carrière. Ce qui distingue surtout Bruno Le Maire de tous ses concurrents, c’est qu’il n’est élu que depuis neuf ans. A 51 ans, François Baroin, lui, est parlementaire et maire depuis près de vingt-cinq ans. Quant à son cadet Laurent Wauquiez, il était déjà député en 2004, à l’âge de 29 ans. Depuis 2012, il s’est donné les moyens de combler son déficit de notoriété, se lançant dans un interminable périple, l’équivalent de plusieurs tours de France. En vain, puisque sa campagne n’a jamais vraiment décollé.
La bonne surprise
Après avoir officialisé sa candidature, il a fait le pari (risqué) d'une démonstration de force. Pari gagné, plus de 2 000 «lemairistes» se sont déplacés, le 5 mars, pour un grand meeting de soutien aux Docks d'Aubervilliers. Scénographie et décors soignés, éclairage spectaculaire : l'ex-ministre de l'Agriculture démontrait qu'il avait les moyens de jouer dans la cour des grands. «Nous allons réinventer ensemble la France, réinventer la nation», lançait un Le Maire sans cravate et en bras de chemise.
Le ratage
Il le reconnaît lui-même : Bruno Le Maire est passé complètement à côté du premier des trois débats télévisés de la primaire. Il est apparu sentencieux et mécanique. Tout le contraire de la jeunesse et du renouveau qu'il prétend incarner. «On m'a fait jouer un rôle alors qu'il fallait me laisser raconter mon histoire», disait-il après l'émission. Victime d'une overdose de coaching, le candidat s'est juré de redevenir lui-même lors du troisième débat.
La réplique qui tue
«Mon intelligence est un obstacle» : grâce à cette saillie, rapportée par le Point, il a décroché haut la main le prix du Press Club «humour et politique» 2016. L'ex-ministre s'était attiré un déluge de railleries. Il a précisé sa pensée : «C'est une erreur de penser que l'intelligence seule permet d'apporter des réponses aux problèmes des gens. C'est le cœur qui permet d'abord de comprendre les problèmes et d'y apporter des solutions.»
Les mantras
Sa campagne n'aura été qu'une longue variation sur le thème du renouveau. Dans chacun de ses discours, comme dans les débats télévisés, il a renvoyé dos à dos ses aînés. Selon lui, la France serait «otage d'une classe politique qui refuse obstinément de se renouveler». Puisqu'il n'a été «ni Premier ministre ni président de la République», il estime être le seul à ne pas avoir de responsabilité dans le bilan. «Entre la droite de l'immobilité [Juppé, ndlr] et la droite de la caricature [Sarkozy]», il prétend incarner, lui, «la droite de conviction».
Ralliement
Dans son équipe, on a fondé de grands espoirs sur le ralliement d’Hervé Morin, cocréateur de l’UDI et président du Nouveau Centre. Grâce à ce soutien, le candidat espère avoir élargi considérablement sa base électorale. Ce que les sondages ne confirment pas. Le soutien de Morin tient aussi à des considérations locales : député de l’Eure, Le Maire a soutenu la candidature de Morin à la présidence de la Normandie.
Lâchage
Le député des Hauts-de-Seine Thierry Solère a longtemps été l’un de ses principaux soutiens, notamment lors de la bataille contre Sarkozy pour la présidence de l’UMP. Nommé président du comité d’organisation de la primaire, Solère s’est totalement investi dans cette mission et s’est peu à peu éloigné du candidat.
Son talon d’Achille
Tout se passe comme si le candidat voulait cacher sa vraie nature d’esthète, passionné de musique et de littérature. Comme si le combat politique passait nécessairement par la brutalité et la caricature. Il n’est pas le seul à être traversé par cette contradiction. Le problème, dans son cas, c’est que cela se voit beaucoup.
Sa mesure phare
Le 18 juin 2017, jour du second tour des législatives, faire un référendum sur quatre mesures pour le «renouveau politique» : réduire le nombre de parlementaires, limiter à trois les mandats dans le temps, obliger les parlementaires hauts fonctionnaires à démissionner de la fonction publique, publier le casier judiciaire de toute personne souhaitant se présenter à une élection.