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Témoignages

De la résignation chez les orphelins de Sarkozy

Dans les Alpes-Maritimes, acquis à l’ancien président, la plupart des électeurs de droite se rallient à Fillon.
Anthony Malvault, 27 ans, professeur de taekwondo et électeur de Nicolas Sarkozy, à Roquebrune-Cap-Martin, le 25 novembre. Il explique aimer «Sarkozy pour ses mesures autoritaires en matière de sécurité. Je suis convaincu que la relance passera par là». (Photo Laurent Carre pour «Libération»)
par Mathilde Frénois, Correspondante à Nice
publié le 25 novembre 2016 à 20h06

Nadia a déchiré sa carte de militante à deux reprises. Le 6 mai 2012 et dimanche dernier. Après la défaite de Nicolas Sarkozy à la primaire, cette Cannoise de 60 ans a plié le carton en deux. «C'est un geste d'écœurement, explique-t-elle. Je suis sarkozyste et je le resterai. Pour moi, c'est lui et personne d'autre.» La passion entre Nadia et l'ancien président de la République ne date pas d'hier. La militante azuréenne a rencontré pour la première fois «Nicolas» à la fin des années 80 : «J'ai flashé sur lui sur une photo. Son visage m'inspirait confiance.» S'ensuivit une inscription au RPR, la responsabilité d'une permanence à Roubaix, «l'effondrement» le 6 mai 2012 puis la création de l'association «Nicolas président» en avril à Cannes. «Depuis le mois d'août, j'ai tracté, j'ai fait du "phoning", j'ai prêché la bonne parole et j'ai bombardé les réseaux sociaux», se souvient-elle. Alors, dimanche, quand les alertes de son portable lui ont appris la défaite de son candidat, Nadia était «dépitée». Et depuis, son état d'esprit n'a pas changé. «Je veux passer à autre chose car je ne me retrouve pas dans ce parti sans Nicolas. Fillon et Juppé, ça ne passe pas et ça ne passera jamais», affirme-t-elle. Au second tour de la primaire de la droite, Nadia ne se rendra pas au bureau de vote.

Taekwondo. Dans un des départements les plus sarkozystes de France, qui a voté à 33,99 % pour l'ancien président, l'attitude de Nadia n'est pas majoritaire. Les principaux soutiens de Nicolas Sarkozy ont apporté leur appui à François Fillon. C'est le cas des très fidèles Christian Estrosi, Eric Ciotti et Marine Brenier, députée de la circonscription. «L'étonnement des résultats passé, avec du recul, on a pris la décision de soutenir François Fillon. Il est désormais celui qui est capable de redresser la France et de donner des emplois», explique Marine Brenier, en pointant des désaccords sur la politique familiale notamment, Sarkozy se déclarant favorable à la fin des allocations au-delà du troisième enfant.

Cette consigne de vote, Anthony et Stéphane la respecteront dimanche. Le premier,27 ans, est professeur de taekwondo. Le second, 47 ans, est cadre. Tous deux habitent à Roquebrune-Cap-Martin, «en terre sarkozyste», insiste Anthony : en 2012, cette commune de l'est des Alpes-Maritimes a enregistré 72 % de voix pour le président sortant… Si ces deux Azuréens le soutiennent, ce n'est pas pour l'homme, mais pour ses idées. «J'aime Sarkozy pour ses mesures autoritaires en matière de sécurité. Je suis convaincu que la relance passera par là», explique Anthony. «C'est la sécurité dans notre rue, de l'emploi et du logement qui me font croire qu'il est encore un homme qui a la stature de diriger notre pays», renchérit Stéphane. Quand les premiers résultats ont donné Sarkozy perdant, les deux copains ont changé leur fusil d'épaule : «On ne s'est pas posé de question. C'était naturel de voter Fillon, il a quand même été le Premier ministre de Sarkozy pendant cinq ans», confie Stéphane. Et peu importe si le député de Paris avait attaqué Sarkozy sur ses deux mises en examen en début de campagne.

«Sarkozy à l'Intérieur». Sur la table d'une brasserie du centre de Roquebrune-Cap-Martin, entre le café et le croissant, Anthony et Stéphane ont posé les programmes de Nicolas Sarkozy et de François Fillon. Comme pour justifier leur nouvelle position, ils ont surligné au marqueur fluo jaune les similitudes entre les arguments des deux candidats. «Sur énormément de points, ils sont similaires. C'est le cas sur la libéralisation de l'économie, sur la fin des 35 heures, sur la baisse de 40 milliards d'euros de charges des entreprises», énumère le cadre qui n'oublie pas son favori de toujours : «S'il est élu, Fillon peut encore choisir Sarkozy à l'Intérieur.» Pour les sarkozystes azuréens, l'espoir court toujours.