Du classique : c’est bien avec Angela Merkel - et non pas avec Vladimir Poutine - que le vainqueur de la primaire aura eu sa première conversation diplomatique au lendemain de sa victoire à la primaire de la droite. La chancelière allemande et le candidat ont convenu de se voir à Berlin au début de l’année prochaine. D’ici là, Fillon a fort à faire. Il doit démontrer ses talents de leader, capable de rassembler le plus largement possible derrière sa candidature et son programme.
«A tes côtés»
Selon les statuts de LR, la victoire de dimanche fait de lui le nouveau patron du parti. François Fillon aurait un schéma en tête : Laurent Wauquiez qui occupait le poste de président par intérim de LR pourrait être remplacé par Bernard Accoyer, l'ancien président de l'Assemblée nationale. Se sachant sur un siège éjectable, Wauquiez avait multiplié ces derniers jours les signes pour manifester sa volonté de rester en place. La semaine dernière, il fut presque menaçant dans le discours qu'il a prononcé à Lyon au grand meeting de soutien au vainqueur du premier tour : «Je serai à tes côtés dans ce travail de rassemblement […]. Mais il faudra faire des gestes : à l'égard de tes adversaires du second tour et à l'égard des électeurs qui ont soutenu Nicolas Sarkozy». «Je ne négocie rien, je ne veux pas entrer au gouvernement en 2017», avait-il ajouté, visiblement décidé à récupérer l'héritage du sarkozysme.
Assis au premier rang, face à l’orateur, François Fillon n’avait pu réprimer, à cet instant, un sourire légèrement ironique. En 2013, après la désastreuse guerre Copé-Fillon, Wauquiez avait été le premier à lâcher l’ancien Premier ministre…
Toujours selon l'AFP, le vainqueur de la primaire de la droite réfléchirait à la mise en place d'une «équipe collégiale» au secrétariat de LR, qui serait formée des fillonistes Gérard Larcher et Bruno Retailleau, de la juppéiste Virginie Calmels, de Nathalie Kosciusko-Morizet, du sarkozyste François Baroin ainsi que de Thierry Solère, un proche de Bruno Le Maire. Mais dans la soirée, Fillon indiquait qu'il n'avait pris «aucune décision».
François Fillon réunit mardi un bureau politique au siège parisien de LR, rue de Vaugirard, pour annoncer la nouvelle organisation du mouvement jusqu'ici contrôlé par des sarkozystes. La journée de lundi a été consacrée aux consultations préalables avec plusieurs hauts responsables LR. Dans cette entreprise, Fillon est épaulé par son directeur de campagne, Patrick Stefanini. Tour de contrôle de la fillonie, ce dernier a démissionné lundi de son poste de directeur général des services de la région Ile-de-France. Désormais entièrement mobilisé au service de Fillon, il devrait être nommé directeur général de LR, poste occupé aujourd'hui par l'ex-patron de la police nationale Frédéric Péchenard, sarkozyste du premier cercle. Le rassemblement ? «Mais il est fait», triomphait dimanche le sénateur Bruno Retailleau, rayonnant de satisfaction au milieu du brouhaha de la fête filloniste. On se bousculait, ce soir-là, dans la grande salle de la Maison de la chimie, à deux pas de l'Assemblée nationale, pour fêter l'écrasante victoire. Parmi les centaines de personnes présentes, il y avait les ralliés de l'entre-deux-tours, sarkozystes et lemairistes, ainsi que les jeunes de Sens commun (l'ex-chef de file de la Manif pour tous Frigide Barjot, qui a souhaité être de la fête, n'a pas été admise dans la salle).
Les droites unifiées
Mais le sacre de François Fillon fascine aussi les vieilles gloires de la droite française. On a vu débarquer dimanche Jacques Blanc et Charles Millon, deux anciens de l'UDF, élus présidents de région en 1998 avec les voix du FN. François d'Aubert et François Goulard, deux successeurs de Fillon au ministère de la Recherche, figuraient dans l'assistance. Pour Goulard, le vainqueur de la primaire serait en passe de réussir à imposer le vrai projet réformateur, «repoussé depuis trente ans». Après les errements idéologiques du chiraquisme et les débordements du sarkozysme, la droite renouerait en quelque sorte avec ses origines gaullo-pompidoliennes…
«Il unifie toutes les droites : les bonapartistes qui se reconnaissent dans son message d'autorité, les légitimistes attachés aux valeurs et les orléanistes qui défendent la liberté», s'enthousiasme Bruno Retailleau, par ailleurs convaincu que le triomphe de son champion limite considérablement la capacité de nuisance des centristes récalcitrants.