Comme on se retrouve… Probable candidat à la primaire, Manuel Valls recroisera en janvier deux anciens camarades : Arnaud Montebourg et Benoît Hamon. Dans son premier gouvernement en mars 2014, ils étaient respectivement ministres de l’Economie et de l’Education nationale. Deux postes de choix… Non sans raison. A mi-quinquennat, ce trio a conclu un pacte déconcertant pour un Valls catalogué à la droite du PS et ses camarades marqués à l’aile gauche. Double objectif : pousser Jean-Marc Ayrault hors de Matignon pour y installer Valls et, ensuite, empêcher Hollande de se représenter. Le chef de l’Etat pris en tenaille, Montebourg et Valls pouvaient ensuite s’affronter à la loyale. Objectifs atteints… mais pas comme ils l’avaient prévu.
Leur scénario initial s'échafaude à l'automne 2013 lors d'un petit-déjeuner dans l'appartement de Montebourg au ministère de l'Economie. Le locataire de Bercy propose ce matin-là du cake à ses invités : Manuel Valls et… Aquilino Morelle. A l'époque conseiller de Hollande à l'Elysée avant d'être viré, ce dernier est un proche des deux hommes. «C'est ce jour-là que nous avons décidé de nous mettre en ordre de bataille pour remplacer Jean-Marc Ayrault par Manuel Valls», confirme Montebourg dans un livre récent (1). En échange de son aide, ce dernier réclame un changement de politique économique. Montebourg prévient le Président qu'il quittera le gouvernement si Ayrault reste en poste après les municipales de mars 2014. Sa compagne Aurélie Filippetti, alors à la Culture, et Benoît Hamon rejoignent l'opération. L'ex-ministre du Redressement productif convainc Christiane Taubira, qui multiplie pourtant à la Justice les bras de fer avec le ministre de l'Intérieur.
Valls à Matignon, Montebourg enclenche le rapport de force avec Hollande pour infléchir la politique économique. Mais le pacte tourne court : lorsque, le 15 août 2014, Hollande interrompt les vacances de Valls pour mettre en scène une simple «réunion de travail» au fort de Brégançon, Montebourg comprend que le couple exécutif ne changera pas de pied. Il voulait convaincre Valls de pousser Hollande vers une politique de relance budgétaire. En vain. La ligne ne bougera pas. Le 24 août 2014, pour sa rentrée annuelle à Frangy-en-Bresse, Montebourg, avec Hamon dans ses bagages, franchit la «ligne jaune». Le lendemain, il est viré. Hamon refuse de se désolidariser et quitte, avec Filippetti, le gouvernement. Les trois hommes, d'une génération socialiste née dans les années 60, auront l'occasion de s'en expliquer dès janvier.
(1) L'Alternative Arnaud Montebourg, Antonio Rodriguez, Cherche Midi.