La primaire approche et les soutiens de Manuel Valls ont un argument en béton : lui seul est «un homme d'Etat». Mardi matin au micro de France Inter, la secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux victimes, Juliette Meadel, a tapé très fort : «Nous avons besoin de choisir celui qui sera peut-être le futur président de la République française. Nous ne sommes pas en train de choisir le premier secrétaire du PS et Manuel Valls est cet homme d'Etat.» La sortie n'a pas fait rire grand monde au Parti socialiste. Qu'importe, le message passe : «Manuel Valls est cet homme d'Etat.» Le tout, bien évidemment, «dans un contexte terroriste».
Dans la foulée, on a croisé un ministre qui roule pour l'ancien chef du gouvernement. Il a lâché un sourire lorsqu'il a entendu les propos de Juliette Meadel. On l'a interrogé sur les forces de l'ancien Premier ministre. Il explique discrètement – Bernard Cazeneuve a demandé à ses ministres de ne pas trop s'impliquer dans la primaire – que «face à la menace terroriste et on le voit aujourd'hui à Berlin», Manuel Valls est «un homme d'Etat qui a été au cœur de l'exécutif ces dernières années». Il prévient : «Le candidat à la primaire doit rester singulier et défendre ses idées qui font sa force.» Comprendre : rester sur ses points forts (sécurité et laïcité) et éviter de trop se recentrer sur sa gauche afin d'inventer un nouveau personnage. Le ministre n'a pas trop apprécié le départ en campagne de son champion.
«Il ne faudra pas qu’il s’énerve trop»
Manuel Valls, «un homme d'Etat», très bien. Et les autres ? Les réponses varient. Un ministre : «Montebourg un flambeur qui mise tout sur l'apparence, Vincent Peillon une danseuse et Benoît Hamon est costaud idéologiquement mais trop éloigné des réalités.» Un député qui pousse Valls depuis des mois, ajoute : «Peillon est un candidat fabriqué qui tombe de la lune, Montebourg est hors sujet et Hamon est un gauchiste qui propose un programme impossible.» Et Manuel Valls au milieu de ce monde ? «Un homme d'Etat solide, loyal, qui a les moyens de répondre à tous les défis.» Logique.
Derrière les mots et l'assurance des soutiens de l'ancien Premier ministre, la crainte n'est jamais loin. Manuel Valls clive – ce n'est pas une surprise – la campagne sera courte, et lors des débats, un «tout contre Valls» se dessine. La partie sera compliquée et il le sait. L'objectif : faire un gros score dès le premier tour, histoire de plier le match. Le candidat compte se préparer dans les prochains jours. «Il ne faudra pas qu'il s'énerve trop et qu'il défende ses idées avec autorité», lance un député. Un ministre se fait du souci, craignant l'aisance oratoire d'un Arnaud Montebourg : «Il a ce côté sûr de lui, il est plus grand en taille que Valls, il parle très bien et ça peut avoir son effet à la télé.» La peur que les Français ne perçoivent pas «l'homme d'Etat» dans leur télé.