Au cours de sa conférence de presse lundi, François Fillon a livré au moins une information : sa société de conseil personnelle, 2F Conseil, dont on savait déjà qu'elle a facturé ses services au cabinet Ricol Lasteryie, a aussi eu pour clients l'assureur Axa, la banque d'affaires Oddo et le holding financier Fimalac. Les contrats passés avec ces entreprises, entre autres, lui ont permis d'enregistrer un chiffre d'affaires de 298 000 euros en 2015, 270 000 euros en 2014 et 446 000 euros entre juin 2012 et décembre 2013. Soit plus d'un million d'euros de revenus en trois exercices comptables.
Les trois sociétés citées par le candidat des Républicains ne sont pas des entreprises anodines. Géant mondial aux 98 milliards d'euros de revenus en 2015, Axa a été dirigé pendant dix-sept ans par Henri de Castries, qui a définitivement quitté l'assureur le 1er septembre dernier. Cette figure incontournable du CAC 40 a rejoint ensuite les rangs de l'équipe de campagne de François Fillon et est souvent citée comme son possible futur ministre de l'Economie. De son côté, la banque Oddo, qui a plus de 100 milliards d'euros d'actifs sous gestion, est chapeautée depuis 1987 par Philippe Oddo, classée 125e fortune de France par le magazine Challenges. Enfin, Fimalac est le holding personnel de Marc Ladreit de Lacharrière, qui en contrôle 88% du capital.
Grand-croix dans l’ordre national de la Légion d’honneur
Marc Ladreit de Lacharrière ? Dans l'affaire Fillon, le milliardaire, 32e fortune de France, joue déjà un rôle de premier plan. Soutien déclaré de l'ancien Premier ministre, il possède, via Fimalac, la Revue des deux mondes, qui a employé Penelope Fillon en 2012 et 2013 avec un salaire, totalement extravagant vu l'économie de cette publication, de 5 000 euros brut par mois – un travail dont le parquet national financier cherche à savoir s'il était réel, comme l'affirme Marc Ladreit de Lacharrière. Le 31 décembre 2010, l'homme d'affaires a été élevé à la dignité de grand-croix dans l'ordre national de la Légion d'honneur par François Fillon. Ce qui pourrait amener le parquet national financier à étendre l'enquête en cours à des faits de trafic d'influence, selon le Monde.
Très généreux avec Penelope Fillon, Marc Ladreit de Lacharrière a donc rémunéré également François Fillon pour des prestations de conseil, que ce dernier n'a pas détaillées lors de sa conférence de presse. Quelle était la nature du travail effectué par François Fillon pour Fimalac ? Quel était le montant de sa rétribution ? Interrogée par Libération, la conseillère en communication du prétendant à l'Elysée, Anne Méaux, nous a fait savoir que Marc Ladreit de Lacharrière devait communiquer à ce sujet dans la soirée. Contacté, Fimalac ne nous a pour le moment pas répondu.
Une plus-value nette de 1,6 milliard d’euros
Actionnaire minoritaire du groupe de casinos et d'hôtellerie Lucien Barrière avec 40% du capital, Fimalac, qui a réalisé un chiffre d'affaires consolidé de 358 millions d'euros en 2016, a fait un virage stratégique il y a plusieurs années. La holding a ainsi progressivement revendu ses parts dans son activité historique, l'agence de notation financière Fitch, tombant à 20% en 2015 et encaissant au passage une plus-value nette de 1,6 milliard d'euros. A partir de 2013, soit peu de temps après que François Fillon avait créé sa société de conseil, elle s'est réorientée dans le spectacle vivant et, surtout, les médias en ligne.
Côté médias, Fimalac possède Webedia, qui regroupe notamment les sites Allociné, Jeuxvideo.com et PurePeople, ainsi que Mixicom, le réseau YouTube agrégeant les chaînes des stars Norman, Cyprien et Squeezie. Côté spectacle, Marc Ladreit de Lacharrière dirige un petit empire comprenant à la fois les sociétés de production de Gilbert Coullier (Céline Dion, Patrick Bruel, Garou…) et Thierry Suc (Yannick Noah, Mylène Farmer) et des lieux comme la salle Pleyel ou le réseau des Zenith. Est-ce pour ses précieuses connaissances d'Internet et du show-biz que François Fillon a été engagé par Fimalac ?