Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'Education nationale depuis l'été 2014, espère que cette campagne permettra «enfin» d'aborder les débats de fond en éducation.
Comment appréhendez-vous cette campagne ?
J'ai passé les trois dernières années à me débattre contre des approximations et des mensonges, des procès d'intention sur des réformes imaginaires, comme le supposé apprentissage obligatoire de l'arabe en CP ou la prétendue réforme de l'orthographe. L'avantage d'une campagne présidentielle, c'est qu'enfin les projets de société des uns et des autres apparaissent en plein jour. A chaque réforme que nous avons menée pour mieux prendre en compte la diversité des élèves (le dispositif «plus de maîtres que de classes», par exemple), l'opposition nous taclait : «Vous nivelez par le bas, c'est scandaleux.» Maintenant qu'ils dévoilent leurs programmes, tout est clair : leur solution pour «élever le niveau du système scolaire», partagée d'ailleurs par la droite et l'extrême droite, c'est de se débarrasser d'une partie des élèves le plus tôt possible. Marine Le Pen veut sélectionner les enfants dès l'âge de 12 ans avec son «collège différencié». Voilà donc comment ils valorisent l'enseignement professionnel, en en faisant une voie de relégation pour les élèves en échec ! Oui, la confrontation des projets aura du bon et j'ai hâte que nous ayons ce débat de fond.
Que pensez-vous du programme de Benoît Hamon en éducation ?
Je suis aussi en train de rédiger mes propositions pour l'enrichir. Avec notamment la réforme de l'éducation prioritaire pour les lycées, que je n'ai pas eu le temps de mener. Mais aussi cette idée à laquelle je tiens, d'étendre la scolarité obligatoire dès 3 ans et jusqu'à 18 ans [au lieu de 16 ans aujourd'hui, ndlr]. Par ailleurs, je pense que nous devons concentrer nos efforts sur l'enseignement supérieur et la recherche.
Vous ne touchez donc plus au primaire ni au secondaire ?
Les réformes ont été faites pour l’école et le collège. Il faudra continuer à créer des postes et améliorer la formation continue des enseignants. Aller plus loin sur la question de la mixité sociale. Pour le lycée, il faudra tirer le bilan de la réforme de 2010 et améliorer le passage du lycée à l’enseignement supérieur. Pour le reste, je pense en effet que le prochain quinquennat doit donner la priorité au supérieur et à la recherche car l’objectif d’amener 60 % d’une classe d’âge à en être diplômée nécessite des moyens importants.