Hamon en voyage d’étude de gauche
Un pays où les socialistes gouvernent avec le soutien de la gauche radicale et des communistes. Un gouvernement qui sort ses concitoyens de l'austérité et applique son programme à la lettre tout en réduisant le déficit. On ne compte plus les symboles qui ont conduit Benoît Hamon à étrenner par un déplacement au Portugal son statut de candidat à l'Elysée sur la scène internationale. «Ils ont démontré qu'on peut sortir de l'austérité, retrouver un sillon de croissance, concilier économique et social», a souligné Hamon en arrivant à Lisbonne vendredi après-midi pour une visite de trente-six heures où il doit rencontrer tous les leaders de cette gauche plurielle, y compris le populaire Premier ministre, António Costa. Lire aussi sur Libération.fr
Les lignes bougent. On ne sait pas trop jusqu'où. Mais il y a du mouvement à gauche. Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot et Benoît Hamon discutent. Jamais les trois en même temps - il ne faut pas trop rêver -, mais les contacts existent. Hier, aujourd'hui, demain sous le regard des sympathisants de gauche (lire aussi l'appel page 7). C'est vrai, le rassemblement est encore loin, compliqué, et chaque candidat joue sa partition. Mais il y a une chose nouvelle et importante : le rassemblement n'est plus impossible. Une bonne nouvelle pour les sympathisants de gauche. Petit tour d'horizon.
Jadot se place au centre du jeu
Feu vert pour le député européen. Consultés sur Internet, presque neuf électeurs d'EE-LV sur dix se sont prononcés en faveur d'un dialogue entre Yannick Jadot et les deux autres candidats. Ce n'est pas une surprise. Et Jadot n'a pas attendu le vote pour discuter. Il échange régulièrement avec Benoît Hamon. Jeudi, le candidat écolo a rencontré Jean-Luc Mélenchon. Entre les deux, pas de grande amitié : ces dernières semaines ont été marquées par des passes d'armes à distance. Le rendez-vous s'est bien déroulé. Pas de grosse bise, mais «une discussion franche et constructive». La même journée, une délégation des écolos a rencontré la direction du Parti de gauche. Constat de Sandra Regol, porte-parole d'EE-LV : «Beaucoup de convergences entre nous, on va se revoir très vite.»
Pendant ce temps, les discussions avec Hamon se poursuivent. Un accord est proche. MaisJadot temporise. Le calendrier d’abord. Rien avant l’officialisation, d’ici une semaine, de la consultation internet. La stratégie ensuite. L’écolo ne veut pas tomber dans les seuls bras de Hamon. Il souhaite aussi ceux de Mélenchon. Du coup, avant de signer, il discute avec tout le monde.
Hamon décroche son téléphone
Sa victoire à la primaire a tout changé. Deux jours après, il rencontrait Yannick Jadot, puis David Cormand, le chef des Verts. Depuis, il prend son temps. Son équipe rencontre régulièrement celle de Jadot. Certains socialistes s’impatientent. Du genre «ça traîne et ce n’est pas bon signe». Pas lui. Il ne veut pas froisser les ego et tout faire capoter. Aujourd’hui, il affiche une certaine confiance. Il espère conclure un accord sur une candidature commune avec les écolos la semaine prochaine.
Avec le candidat de «la France insoumise», c'est différent, un peu plus illisible. On ne sait pas trop ce qui l'intéresse : Mélenchon ou ses électeurs. Vendredi, Hamon a appelé Mélenchon. «Nous nous sommes parlé, vous n'en saurez pas plus, a résumé le socialiste en arrivant au Portugal. Le rassemblement de la gauche n'est pas du théâtre. Ni lui ni moi ne voulons feuilletonner. Vous étiez inquiets, nous avons parlé. Vous êtes inquiets : nous allons nous voir. Punto finale.»Les deux hommes devraient se rencontrer à la fin de la semaine prochaine.
Une chose est certaine, Hamon ne cédera pas à la requête de Mélenchon : celui-ci veut que le socialiste se sépare des ministres qui ont soutenu la loi travail afin de prouver son détachement vis-à-vis du pouvoir en place. Comprendre : pas de circonscription pour Valls, El Khomri, etc. «Le rassemblement ne se fera pas en coupant des têtes», dit Hamon.
Mélenchon s’adapte
La présidentielle est pleine d'imprévus alors que l'ancien socialiste avait tout programmé : la victoire de Sarkozy, puis celle de Juppé à la primaire de droite. La candidature de Hollande, puis la victoire de Valls à la primaire à gauche. Bref, Mélenchon, qui voulait enfiler le costume du gars qui apporte un nouveau souffle, n'a pas vu venir la victoire de Hamon. Du coup, il s'adapte. Les reproches s'accompagnent toujours d'une main tendue. Il répète qu'il est disponible pour rencontrer le candidat PS. Et jeudi, il a pris le temps de discuter avec Jadot. Vendredi, en attendant le coup de fil de Hamon, il lui a écrit un courrier (à lire sur Libération.fr ) afin de dessiner le périmètre d'un possible rassemblement : aucun contact avec Macron, dire non aux accords Ceta et Tafta, garantir une nouvelle République… Le candidat de la France insoumise s'est même dit prêt à consulter les «250 000 personnes qui soutiennent» sa candidature sur la plateforme JLM 2017. Reste une question, la même que pour Hamon. A qui s'adresse Mélenchon : à Hamon ou à ses électeurs ? Réponse dans les prochains jours.