«Cette proposition n’est pas nouvelle. Elle était déjà formulée dans le rapport Stasi qui avait été publié en décembre 2003. C’est le sociologue Patrick Weil qui, à l’époque, avait beaucoup insisté pour qu’elle y figure. Pour ma part, je considère que c’était bien pensé. Mais c’en était resté là… Tout avait été écrasé alors par la question du voile à l’école et l’avis qu’avait rendu la commission Stasi. Pourtant, il me semble que Jacques Chirac était en position d’instaurer ces deux jours fériés musulman et juif, au début de son second mandat présidentiel. Cela aurait été le geste fédérateur que l’on attendait (et qui n’est pas venu) après sa réélection de 2002 dans les circonstances particulières que l’on connaît.
«En France, le statu quo actuel désavantage objectivement les fidèles musulmans. Comme nous sommes dans une société de tradition catholique, les jours fériés sont liés aux fêtes chrétiennes. Pour les fidèles chrétiens, cela tombe bien ! Mais ce n’est pas le cas pour les juifs et les musulmans. La laïcité, ce n’est pas seulement la liberté de conscience ou la neutralité de l’Etat, c’est aussi un traitement équitable des cultes.
«Nous avons choisi de proposer de supprimer les lundis de Pâques et de Pentecôte parce que ce ne sont pas des jours de solennité religieuse mais des lendemains de dimanche, des jours de récupération, des traditions, en somme. Dans notre esprit, ce n’est pas du tout une position agressive contre l’Eglise catholique ou une volonté de déchristianisation de la France. C’est une recherche d’égalité de traitement et de justice.
«Nous sommes dans une société de pluralisme religieux et nous devons en tenir compte. Nous proposons à la fois d’établir un jour férié juif et un jour férié musulman. L’un ne peut pas aller sans l’autre. C’est un principe, à nos yeux, important. Si la République reconnaît le pluralisme, elle doit le reconnaître jusqu’au bout. Il ne s’agit pas non plus d’instaurer un jour à la carte, un jour distinct selon les cultes, mais un jour férié national. En termes de reconnaissance du pluralisme religieux, ce serait une décision importante. Il n’y a pas eu, à l’égard des musulmans, de geste de cette sorte depuis l’inauguration des travaux de la Grande Mosquée de Paris en 1922.
«Ce n’est pas non plus une mesure très compliquée à mettre en place. Combien même elle ne résout pas les problèmes de fond touchant à l’organisation de l’islam ! Elle serait importante symboliquement. Peut-être polémique, oui ! La classe politique craint sans doute que le sujet soit trop sensible en l’état actuel de l’opinion. Quoi qu’il en soit, ce serait une décision politique forte ! Même si les politiques sont frileux, ce n’est pas une raison pour ne pas le proposer. Notre rôle est de faire vivre le débat !»