«Non.» Il ne le donnera pas. Le délégué général à l'armement, Laurent Collet-Billon, refuse fermement de donner le montant des commandes d'armement français pour l'exportation en 2016. Alors que l'exécutif fanfaronne régulièrement à propos des résultats inédits de «l'équipe France», dont fait partie la Direction générale de l'armement (DGA), Laurent Collet-Billon n'en a pas soufflé mot lors de la présentation à la presse du bilan 2016 de la DGA. A peine a-t-il consenti à souffler du bout des lèvres que «certaines commandes étaient fermes mais pas d'autres».
La DGA n'avait eu la même pudeur l'année dernière. Présentant ses résultats pour l'année 2015, elle donnait une estimation de 16 milliards d'euros de prises de commande avec les premières ventes de Rafale au Qatar et à l'Egypte, qui avait aussi acquis deux frégates. Idem les années précédentes : le même Collet-Billon se félicitait d'avoir dépassé les 8 milliards d'euros en 2014 et avait également donné un chiffre, un an plus tôt.
Colossal appel d’offres
Pourquoi avoir rompu avec cet effort, certes largement perfectible, de transparence ? Même sur ce point, le directeur général de l'armement n'a pas voulu répondre. Selon la Tribune, les comptes faits par la DGA ne tomberaient pas juste avec ceux de son ministre de tutelle. En cause : le contrat pour les sous-marins australiens, un colossal appel d'offres pour douze appareils qu'ont remporté les industriels français DCNS et Thales. Après la signature en septembre d'un contrat qui définit les études d'ingénierie (dit «Design and mobilisation contract»), un accord intergouvernemental a été signé en décembre par les deux Etats. «D'autres doivent suivre dans les prochaines années», indique-t-on chez DCNS. Ils permettront de préciser les montants exacts pour un projet qui doit s'étaler sur presque cinquante ans.
Futurs drones
Sur les projets, à plus ou moins long terme, Laurent Collet-Billon s'est en revanche montré beaucoup plus prolixe. Que ce soit pour Airbus, où le départ de Marwan Lahoud a laissé un vide que le directeur de la DGA veut voir comblé par «un correspondant français au plus haut niveau», seul à même de traiter des sujets «spécial France». Ou du rachat de STX par l'italien Fincantieri, qui laisse le DGA de marbre tant qu'il conserve un accès à la «grande forme» (900m de long sur 67m de large) et au portique de levage (capacité de 1 400 tonnes) de Saint-Nazaire, seul chantier naval français capable de construire un porte-avions de nouvelle génération. Ou encore des futurs drones : le Futur Combat Air System (FCAS) développé avec le Royaume-Uni qui reste «un partenaire privilégié» malgré le Brexit, et le projet de drone Moyenne altitude, longue endurance (Male) européen lancé en partenariat avec l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie. Sera-t-il armé pour concurrencer les Reapers américains ? La réflexion n'est pas arrêtée. «Nous avançons à plusieurs, c'est plus long et plus complexe, indique Caroline Laurent, directrice de la stratégie à la DGA. La population d'un pays concerné ne veut pas de drone armé : l'Allemagne.»