L'avant-dernier jour du procès de Redoine Faïd, jugé pour son évasion de la prison de Sequedin, près de Lille, en avril 2013 (dont Libération avait révélé l'enquête ainsi que les images impressionnantes), a commencé dans une drôle d'ambiance. Ce mercredi matin, sur l'A21 en direction de Douai, le fourgon pénitentiaire qui transporte le braqueur, figure du grand banditisme, jusqu'à la cour d'assises est percuté par… une voiture de la gendarmerie. L'accident, qui a peut-être un temps pu être perçu par l'escorte comme une nouvelle tentative de l'accusé de se faire la belle, n'a causé que des blessures superficielles.
C’est donc avec une minerve autour du cou que Redoine Faïd, 44 ans, a assisté au réquisitoire de l’avocat général. Les faits qui lui sont reprochés sont simples : lors de son incarcération entre les murs de Sequedin, près de Lille, il a pris quatre surveillants en otage et les a utilisés comme des boucliers humains pour se ménager un chemin vers la lumière. Après avoir fait sauter cinq portes avec des explosifs, il a été récupéré par un complice à l’extérieur. Le fugitif sera arrêté, avec plusieurs comparses, le 29 mai, dans un hôtel de la banlieue parisienne.
«Pas un tueur… Pas un ange»
«Dans son récit, Redoine Faïd a dit "J'ai ébréché la porte avec un explosif", mais il a aussi ébréché des personnes, des surveillants qui disent aujourd'hui "On est toujours vivants, mais quelque chose s'est cassé"», a dénoncé Eric Bedos, l'avocat général. Durant les six jours de procès, Redoine Faïd n'a pas cherché à minimiser les faits et a assumé son «appel de la liberté». Il a expliqué sa cavale par le désir de revoir son père mourant et le sentiment d'injustice d'être incarcéré pour un crime dont il s'est toujours dit innocent. Malgré ses dénégations, il a été condamné, en 2016, à dix-huit ans de réclusion criminelle pour le braquage d'un fourgon blindé à Villiers-sur-Marne au cours duquel la policière Aurélie Fouquet a été tuée. «Je ne suis pas un tueur, pas un assassin, pas un fou… Pas un ange», a-t-il dit aux jurés de la cour d'assises de Douai, selon la Voix du Nord.
Les arguments de l'accusé pour justifier sa spectaculaire évasion ont été écartés par l'avocat général qui a assené : «Je suis convaincu que si on se déclare innocent dans une procédure, on s'en défend dans les règles et la loi. En tout cas, on ne violente pas des personnels qui ne font que leur travail.» Eric Bedos a également rappelé aux jurés la «souffrance» endurée par les différents témoins de la fuite. «Essayez d'imaginer ce que ça peut être, le fracas de chacune des explosions, un coup de feu rapidement tiré au début de l'évasion dans une pièce fermée, d'être à genoux, les mains jointes, tenus par le col, de sentir l'arme à proximité !» Avant de requérir entre douze et quatorze ans de réclusion criminelle contre Redoine Faïd et des peines de trois à sept ans contre ses quatre complices présumés. Le verdict devrait être rendu mardi.