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Edito

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publié le 19 mars 2017 à 20h46

Retour aux fondamentaux. La grosse manif pour se compter, le grand meeting bourré de militants, la bonne vieille télé et le bon gros direct pour un débat. A l’ancienne. Pourtant, depuis le temps qu’on se disait que l’élection allait se jouer sur l’Internet (souvenez-vous des blogs en 2007 et des réseaux sociaux en 2012), on se disait qu’avec l’arrivée des «fake news» et du «Big Data», 2017 devait être la bonne. Encore raté ? Nous voici en tout cas à tenir pour essentiel le débat de lundi. Avec sa minute par sujet et par candidat, il servira surtout à faire «présidentiel».

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De l'image, encore de l'image, toujours de l'image, pour captiver des millions d'indécis. Comme si cette vieille Ve République, née avec la massification de la télé dans les foyers, ne voulait pas plus mourir que la télé de grand-papa et que toutes deux cherchaient de concert à s'auto-régénérer en inventant un format inédit pour des candidats autoproclamés anti-système. Alors, Internet, plateforme totale mais toujours impuissante à modifier la donne politique et médiatique ? Il est indéniable que le travail souterrain des algorithmes et des bases de données, ou celui, plus visible, des chaînes YouTube et des pages Facebook est capable d'entraîner l'adhésion aux idées et aux mouvements. Les réseaux sociaux ont aussi permis l'empowerment de nouveaux militants, créé de nouvelles formes d'engagement. Des petits commandos numériques ont, eux, réussi à pousser des coups de pression capables de modifier des rapports de forces, obligeant les politiques à se positionner sur des micro-débats.

Mais le futur président devra encore beaucoup au petit écran, point d’ancrage du débat pour les électeurs les plus nombreux (les plus vieux). Pourtant, la fluidité d’Internet n’est jamais loin. Comme si la matrice avait fusionné avec le corps électoral. Dans une campagne où les projets des candidats se superposent comme des diagrammes de Venn, rarement les échanges d’intentions de vote entre candidats n’auront été aussi versatiles. Logique. Alors que nous aurions dû être otages de nos amis et des algos de Facebook, enfermés dans nos certitudes, nous voici dans une application de dating, prêts à «matcher» avec un candidat, puis à «swiper» à la recherche d’un «rematch», selon l’humeur du moment. Et si, finalement, l’élection ne se jouait ni à la télé, ni sur Internet, mais sur Tinder ?