La symétrie était parfaite, et si commode aux partisans de François Fillon. Ainsi le ministre de l’Intérieur avait lui aussi employé ses proches (ses deux filles) pour un travail d’assistantes parlementaires dont la réalité ne semblait pas assurée. Ainsi la défense du candidat LR était soudain renforcée : ce qu’on lui reprochait à hauts cris était en fait une pratique courante, à droite et à gauche, un péché véniel dont on avait fait un crime, alors que les socialistes usaient des mêmes facilités. Et bien sûr, ajoutait-on, le Parquet national financier s’abstenait soigneusement de s’en mêler, stigmatisant l’un et ignorant l’autre. Il y avait donc bien deux poids, deux mesures, selon qu’on était ou non LR, et un acharnement suspect des médias.
Las ! Ce trop commode raisonnement s’est effondré en une journée. Le Parquet financier s’est aussi saisi du cas Le Roux, le Premier ministre a d’emblée pris une position rigoureuse et le ministre accusé a laissé la place aussitôt. Certes, il y avait bien suspicion de faute à gauche, comme à droite (quoique pour des montants très inférieurs). Mais la réaction du pouvoir hollandais contraste du tout au tout avec celui des dirigeants de la droite et de l’extrême droite : le ministre de l’Intérieur a perdu son poste en vingt-quatre heures. Marine Le Pen et François Fillon continuent à faire campagne comme si de rien n’était, jouant l’électorat contre l’éthique et la justice.
C’est encore un paradoxe de cette mandature Hollande. Ebranlé par l’affaire Cahuzac, le Président a fait voter un dispositif neuf qui fait progresser à grands pas, aux dires de toutes les ONG spécialisées dans ce domaine, la lutte contre la corruption en France. Il a resserré le filet : les poissons s’y prennent plus nombreux. Le Roux, après Fillon ou Le Pen, s’y est empêtré. Mais les deux derniers, contre toute morale, nagent toujours.