Devant le palais de justice de Blois, Aurélie et Vanessa affichent un sang-froid qui force l'attention. Elles veulent connaître, comme plus de 200 personnes réunies samedi dernier, les conditions exactes dans lesquelles leur frère Angelo a trouvé la mort au domicile familial de Seur (Loir-et-Cher), le 30 mars. Angelo Garand, membre de la communauté des gens du voyage, était recherché pour ne pas avoir réintégré, après une permission en septembre, la prison de Vivonne (Vienne) où il purgeait une peine de deux ans pour des cambriolages. Selon Frédéric Chevallier, le procureur de la République de Blois, il aurait opposé de la «résistance» au moment de son interpellation. Le procureur a justifié l'intervention du GIGN, diligentée par le tribunal de grande instance de Poitiers, par la dangerosité du détenu, titulaire d'une vingtaine de mentions au casier judiciaire.Les gendarmes d'élite ont expliqué qu'Angelo les avait menacés avec un couteau, obligeant deux d'entre eux à user de leur arme à feu après avoir tenté de le neutraliser à coups de Taser.
«Jamais Angelo ne se serait jeté sur trois membres du GIGN. Ce n'est peut-être pas un ange, mais il n'est pas suicidaire», clament ses sœurs, absentes au moment des faits mais qui relaient le témoignage du père. Ce nouvel épisode rappelle, localement, la mort de Luigi Duquenet, abattu par les gendarmes en 2010 alors qu'il venait de forcer un barrage. Et interroge sur les rapports parfois tendus entre la gendarmerie et les gens du voyage. Dans le cortège, André Sauzer, le grand-oncle d'Angelo, ne comprend pas pourquoi une telle force de frappe a été déployée.«La justice doit passer pour tous, mais dans le respect de la loi, dit-il. J'ai manifesté pour les policiers assassinés, je pense que les prisons sont nécessaires, mais de quel droit peut-on justifier la mort de mon petit-neveu au seul motif qu'il était connu de la justice ? Je rappelle que depuis Badinter, la peine de mort est interdite en France.»
La gendarmerie précise qu'il s'agit non pas du groupement national GIGN, mais d'une antenne, celle de Tours. Des hommes bien moins formés que leurs aînés.«La possibilité qu'il se soit agi d'un entraînement n'est pas à écarter», avance une source policière. En d'autres termes, les gendarmes auraient pu intervenir pour se faire la main entre deux missions, comme peuvent le faire d'autres compagnies d'élite.
Une information judiciaire a été ouverte. La famille s'est constituée partie civile afin d'avoir accès aux éléments du dossier. Elle a reçu l'appui du collectif «D'ailleurs nous sommes d'ici 37» et de l'association «Urgence notre police assassine», qui milite contre la «présomption de légitime défense» considérée comme «un permis de tuer».