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Libération
Polémique

Mélenchon ne veut pas présenter ses excuses à Cazeneuve

A quinze jours du premier tour des législatives, le leader de la France insoumise ne compte pas présenter ses excuses à l'ancien ministre de l'Intérieur et se dit prêt à aller en justice pour défendre ses propos sur la mort du militant écologiste Rémi Fraisse en 2014.
Jean-Luc Mélenchon lors d'une cérémonie en hommage à Rémi Fraisse, le 2 novembre 2014 à Paris. (Photo Kenzo Tribouillard. AFP)
publié le 30 mai 2017 à 17h05

C'est un Mélenchon très remonté qui s'est présenté mardi au siège de campagne de la France insoumise, rue de Dunkerque (10e arrondissement de Paris). En tout, une heure de show pendant laquelle le candidat aux législatives qui se présente à Marseille dans la quatrième circonscription, a demandé une «trêve médiatique dans l'injure», fustigeant un «Mélenchon bashing» dont lui et ses «amis» seraient victimes depuis une semaine. En deux mots : «Lâchez-nous» a-t-il lancé à l'attention de journalistes, selon lui plus préoccupés par l'écume de la politique que par «le fond» de son programme.

Il faut dire que, depuis une semaine, la polémique qui l'oppose à Bernard Cazeneuve sur les circonstances de la mort de Rémi Fraisse bat son plein. Ce mardi matin encore sur France Inter, l'ex-Premier ministre se disait prêt à retirer sa plainte pour diffamation s'il recevait les «excuses» du leader de la France insoumise.

Pour rappel, Jean-Luc Mélenchon avait remis cette affaire sous le feu des projecteurs la semaine dernière en affirmant lors d'un meeting à Montreuil (Seine-Saint-Denis) que Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, était non seulement responsable de la mort du jeune homme, tué en octobre 2014 par une grenade offensive d'un gendarme, mais de s'être «occupé de son assassinat». Tollé. Mais lors de cette conférence de presse, le leader de la France insoumise ne parle plus d'assassinat mais «d'homicide», parlant d'un terme «mal calibré».

«Je suis d'accord pour requalifier d''homicide' et je prie pour qu'on comprenne que dans un meeting de 45 minutes il peut arriver qu'un mot ne soit pas calibré exactement. (...) Je n'accuse pas M. Cazeneuve d'être venu lui-même assassiner quelqu'un, enfin ! De grâce ! Vous ne savez pas ce que c'est qu'un meeting, un discours qui dure trois quarts d'heure ?», a-t-il répondu à une question sur la gravité de l'accusation d'«assassinat».

 Responsabilité

Plutôt que des excuses, Mélenchon – qui a affirmé avoir été «piqué» lorsque Cazeneuve, durant l'entre-deux tours de la présidentielle, avait dénoncé sa «faute morale» quand il tardait à appeler nettement à faire barrage à Marine Le Pen – a préféré présenter des explications. Sur les propos qu'il a tenus sur Twitter et à Montreuil à l'encontre de Cazeneuve, mais aussi sur la responsabilité de ce dernier, dont il avait demandé la démission à l'époque. «Je n'ai pas accusé Monsieur Cazeneuve d'avoir tué Rémi Fraisse. J'ai évoqué la responsabilité d'un homme qui est le chef de son administration», a-t-il précisé avec fermeté.

Loin de s'incliner devant la menace d'un procès en diffamation, Mélenchon ne compte pas enterrer la hache de guerre et se dit prêt à aller devant la justice s'il le faut : «Si Monsieur Cazeneuve estime qu'il est juste de porter plainte, je l'invite à le faire» a-t-il ainsi lancé, un brin provocateur, avant d'ajouter que «tout compte fait, ce procès serait utile pour que la vérité éclate» et qu'il plaiderait dans ce cas «la bonne foi».

«C'est la seule occasion d'amener devant un prétoire cette affaire (...) et alors on verra qu'en effet, M. Cazeneuve est l'homme qui a mis en place des méthodes d'intervention d'une violence extrême dont les manifestants de la loi El-Khomri se souviennent parfaitement», a-t-il poursuivi. Pour Sivens où le jeune homme est mort en 2014, «il a été établi que des grenades offensives ont été utilisées et que le commandement de l'opération sur le terrain s'était déroulé en dehors de la présence de tout civil qui rend la forme de l'intervention illégale (...)», a dit Jean-Luc Mélenchon. «Je ne crois pas que M. Cazeneuve ait à gagner à ce procès», a-t-il ajouté, l'appelant à «la retenue». «Oubliant» que, lors d'un procès en diffamation, on ne juge pas sur le fond.

Si Mélenchon invite à recentrer le débat sur le «fond» de son programme, cela ne l'empêche pas de surfer sur les affaires qui touchent ses opposants politiques, notamment celles du ministre Richard Ferrand. Doit-il démissionner ? Mélenchon ne se prononce pas sur la question, mais pour lui, c'est «une excellente vitrine du macronisme réel».