C'est encore une fois une vidéo amateur qui a permis de faire émerger une nouvelle affaire de violences policières. Filmée au smartphone par des témoins, elle montre un homme noir frappé à terre et à la tête par un policier devant un de ses collègues qui ne moufte pas. Vendredi 26 mai, Elvis (prénom qu'il donne dans la presse) rentre chez lui quand une voiture de police s'arrête à son niveau, devant un kebab des Lilas (Seine-Saint-Denis) où il a fait halte. Les fonctionnaires veulent contrôler l'identité de cet agent de maintenance de 40 ans, qui s'en étonne, selon le récit reconstitué par l'Obs. Les deux policiers sortent alors de leur voiture et le mettent au sol. Puis l'un d'eux le malmène violemment, comme le montre la vidéo diffusée le week-end suivant sur le Web et reprise par des collectifs engagés contre les violences policières. Un policier a raconté, sous couvert d'anonymat et sans avoir accès au dossier, une autre version : Elvis, ivre, aurait essayé d'uriner sur la voiture de ses collègues. Des faits qui n'apparaissent pas dans la vidéo.
Dès lundi, le parquet de Bobigny a transmis la séquence à l'inspection générale de la police nationale, qui a ouvert une enquête. Pendant son déroulement, la préfecture de police de Paris a suspendu le policier visé. Elvis a déposé plainte jeudi, confirme une source proche de l'enquête interrogée par Libé. Cette dernière souligne l'importance de ce genre de vidéos amateur : «Il est toujours précieux d'avoir un outil utile à la manifestation de la vérité.»
Le cas d'espèce est assez singulier, la victime témoignant dans la presse avant même que le parquet ne connaisse son identité. Mais les affaires dans lesquelles les films de témoins jouent un rôle clé se multiplient. Au tout début du mouvement contre la loi travail, la violente agression d'un élève du lycée Bergson, à Paris, par un policieravait été documentée par ses camarades grâce à leur smartphone. L'auteur du coup de poing au visage écopera d'une peine de huit mois de prison avec sursis. Dans deux autres cas de violences policières particulièrement graves pendant ce mouvement social, les vidéos avaient joué un rôle clé.
C’est aussi séquence filmée à l’appui qu’Elsa Moulin, militante contre le barrage de Sivens, avait porté plainte en 2014 contre le gendarme qui l’avait salement blessée à la main, en lançant une grenade de désencerclement dans la caravane où elle se trouvait. Le policier a été mis en examen en janvier.