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Libération

En tailleur Simone

publié le 30 juin 2017 à 21h06

Simone Veil, lors de son grand oral à l'Assemblée en 1974, a marqué une époque avec un discours et une loi. Une allure aussi. Ce 26 novembre, la ministre de la Santé arbore un style resté dans les mémoires. A l'instar de ce moment historique, Veil a affiché, tout au long de sa carrière, un uniforme systématique qui disait tout de sa stature de femme politique, soit le chignon impeccable, une rangée de perles bon chic, la blouse à lavallière, le tailleur Chanel et, dès l'hiver arrivé, un manteau de fourrure, pièce maîtresse de sa garde-robe érigée au rang de fétiche. Simone Veil fut, plus qu'aucune autre, le chantre de ce power dressing apparu à l'aube des années 70, élaboré pour marquer une position hiérarchique, et les contours d'une prise de pouvoir. Il y avait dans son regard bleu une douceur mélancolique et une distance perpétuelle qui forçait le respect. «Tu es trop jolie pour mourir ici», lui dit un jour une kapo d'Auschwitz qui était tombée sous son charme. Sa beauté l'avait ainsi sauvée de la mort et constitua l'un des mythes rattachés à sa personne. Veil était devenue l'archétype de la Française grande bourgeoise qui jamais ne se relâche, cigarette à la main, refusant de porter le jean à la mode et ne se décoiffant qu'en de rares occasions, comme lors de cette interview accordée en 1986 à Christophe Dechavanne : «Je regrette beaucoup d'avoir les cheveux longs depuis que je suis ministre. C'était beaucoup plus facile de se recoiffer avec les cheveux courts, quand on est en voyage tout le temps et qu'il faut être présentable», avait-elle déclaré tout en se détachant délicatement les cheveux à la demande de l'animateur de Toutes folles de lui, parvenant à rester digne dans un instant télévisuel qui ne l'était guère.