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Libération

GM&S : «C’est à vous de forcer le destin»

publié le 30 juin 2017 à 20h46

Le siège de l’usine GM&S continue. Au fond de l’impasse du Cheix, à La Souterraine, c’est presque un décor de cinéma. Bordée de locaux professionnels, l’entrée de l’usine est barrée de presses industrielles installées là pour bloquer les véhicules. A leurs flancs sont plantés les drapeaux rouges de la CGT. Allégorie de sept mois de lutte sociale creusoise, ils sont délavés par l’eau et noircis par les feux qui flambent jour et nuit.

Engagé dans un bras de fer avec les constructeurs français et l'Etat depuis le 2 décembre, le sous-traitant automobile n'en est plus à un coup de théâtre près. Après trois jours de négociations marathon avec Bercy, «l'arlésienne» est finalement arrivée avec l'offre de reprise partielle de GMD jeudi soir (120 des 277 salariés actuels), une poignée d'heures avant le délibéré du tribunal de commerce. Ce dernier en aura tenu compte a minima, en prononçant vendredi une liquidation avec poursuite d'activité jusqu'au 21 juillet. Une respiration pour les salariés, qui entendent en profiter pour reprendre de l'élan. «Ça va pas nous mettre la tête sous l'eau plus qu'on ne l'a déjà. On va continuer à se serrer les coudes et dire simplement que si c'est le dernier virage, alors on va en sortir comme une balle», a lancé le cégétiste Yann Augras, sous les applaudissements nourris de ses collègues. Depuis six mois, ces derniers n'ont pas une seule fois contesté la stratégie du syndicat. S'adressant aux ouvriers, leur avocat Me Jean-Louis Borie a lancé : «Si on reprend l'histoire, en décembre, Peugeot avait décidé de tuer GM&S en lui coupant les vivres. Vous vous êtes battus et en huit mois vous avez obtenu la survie du site. C'est une victoire. J'en ai la conviction : si rien n'avait été fait, en janvier, l'usine fermait. Vous avez gagné 120 postes, à vous de continuer pour en garder plus et pour que la négociation initiée à Paris se poursuive.»

Le sous-texte est celui de l'indemnisation, une question de principe pour les salariés qui n'ont pas obtenu que les partants quittent l'entreprise avec davantage que le minimum légal. Ni GMD ni les constructeurs n'ont accepté de mettre la main à la poche. Et l'avocat de les exhorter au combat : «C'est à vous, en poussant plus fort, de forcer le destin.» Vu de La Souterraine, le combat continue donc.

«Pour moi, les négociations viennent juste de commencer, car tout le monde a enfin pris la mesure de ce qui se passe ici», résume Patrick Brun, l'un des salariés présents à Paris. Une ligne que, semble-t-il, partage la cellule de crise à Bercy, qui a donné rendez-vous aux élus du personnel dès la semaine prochaine. «Une victoire, c'est quand il n'y a aucun licenciement, poursuit Patrick Brun. Ce que je veux, c'est que les gens ici restent libres de leur choix et c'est pour ça que je me bats.»