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Loi travail

Concertations : des partenaires sociaux déconcertés

Loi travail, épisode 2dossier
Reçus par le ministère du Travail parallèlement au débat législatif, les syndicats s’interrogent sur la marge réelle de négociations.
La ministre du travail, Muriel Pénicaud, le 27 juin. (Photo Laurent Troude)
publié le 9 juillet 2017 à 20h06

Etrange calendrier que celui de cette réforme menée à la vitesse de l'éclair : les parlementaires examinent un texte sur lequel les partenaires sociaux ont été en partie seulement «concertés». Le ministère a en effet initié fin juin une série de réunions hebdomadaires avec chacun. Le premier round était consacré à la place respective des accords de branche et d'entreprise. Le gouvernement dit avoir tenu compte de leurs avis pour rédiger le projet de loi d'habilitation. Mais ce n'est pas le cas pour les autres mesures de la réforme, que les syndicats ont continué de discuter après la présentation du texte en Conseil des ministres. Chez les organisations syndicales, le trouble est palpable. Toutes saluent l'effort d'écoute du gouvernement. Mais elles n'excluent pas non plus qu'il les mène en bateau.

«La concertation sert à quelque chose. On voit se refermer des portes qui, sans ces réunions, seraient restées ouvertes», plaide Philippe Louis. Le chef de file de la CFTC se dit par exemple rassuré par les séances consacrées au rôle de la branche : cette dernière ne serait pas aussi affaiblie qu'il le craignait. Pourtant, le gouvernement lui-même ne cesse de répéter que ses arbitrages ne sont pas définitifs. «Nous sommes encore dans le temps de la concertation, a rappelé le Premier ministre, mardi. A la fin de l'été viendra le temps de la décision, quand les ordonnances seront publiées.» D'où la méfiance des syndicats. «Il y a encore une grande opacité sur la façon dont le gouvernement va procéder, s'inquiète un responsable CGT. Le projet de loi d'habilitation, c'est une chose. Mais pourra-t-on vraiment négocier le contenu des ordonnances lors de séances plénières ?»

Le ton s’est d’ailleurs durci lors du deuxième cycle de concertation achevé vendredi. Les syndicats sont unanimement inquiets que la fusion des instances représentatives du personnel, voulue par le gouvernement, n’affaiblisse le CHSCT, expert de la santé et de la sécurité au travail. Tous refusent aussi que la nouvelle instance négocie des accords d’entreprise, qui sont aujourd’hui le pré carré des délégués syndicaux. Pour l’heure, le projet de loi d’habilitation est assez flou pour le permettre. Le ministère devrait faire connaître ses choix ce lundi.

C'est aussi ce lundi que s'ouvre la dernière session de rencontres, prévue jusqu'au 21 juillet. Les points les plus polémiques seront expédiés en deux séances par organisation. Sous couvert de «sécuriser les relations de travail»,il s'agit surtout de faciliter les licenciements. Au menu : plafonnement des indemnités prud'homales, relèvement du seuil de déclenchement du PSE, allégement des obligations de reclassement des salariés, extension du CDI de chantier, refonte du périmètre géographique des PSE pour faciliter les licenciements des multinationales qui font des profits hors de France, etc. Ce dernier point, comme le barème obligatoire aux prud'hommes, figurait dans une première mouture de la loi El Khomri, avant que le gouvernement ne fasse marche arrière face au tollé. Cette fois, l'exécutif n'a pas l'intention de reculer. Les syndicats ont évolué : FO et la CFDT sont désormais prêtes à en discuter.