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Interview

Pour Fabienne Blaise : «Il faut quelque chose de plus juste que le tirage au sort»

La présidente de Lille-III, Fabienne Blaise, est favorable à une réforme de l’orientation post-bac en instaurant des prérequis.
publié le 17 juillet 2017 à 20h36
Quelque 87 000 futurs étudiants sont en attente d’affectation pour la rentrée. Qu’en pensez-vous ?

Cette situation montre que le système a atteint ses limites. On doit envisager une autre manière, plus juste que le tirage au sort, pour l’inscription des étudiants dans l’enseignement supérieur. Une solution, la plus simple mais pas forcément la meilleure, est de dire qu’il faut augmenter le nombre de places. Une autre solution, à laquelle je suis favorable, c’est les prérequis [consistant à conditionner à des acquis l’admission d’un bachelier dans une filière, ndlr]. Cette méthode n’exclut pas les étudiants mais leur permet de mieux réussir.

Le système est hypocrite : on dit qu’il n’y a pas de sélection, mais il y a une sélection par l’échec. Environ 60 % des étudiants de première année ne poursuivent pas dans leur cursus.

Obtenir son bac n’est pas suffisant pour entrer dans les études supérieures ?

Cela dépend de la filière. Un étudiant qui s’inscrit en langues étrangères anglais et italien mais qui n’a jamais fait d’italien a peu de chances de réussir. Soit on lui recommande de s’inscrire ailleurs, soit on lui donne les bases, avec une sorte d’année zéro qui lui permettrait ensuite d’accéder à la licence de son choix. Une autre piste, qui n’est pas exclusive, est de mieux préparer les lycéens à ce qu’est l’enseignement supérieur. Le dialogue entre le secondaire et le supérieur doit être plus fluide. Il faut aussi comprendre que l’université n’est pas la seule institution d’enseignement post-bac. Les BTS, par exemple, doivent jouer leur rôle.

De toutes les façons, cela demande des moyens. Les nôtres ne sont pas illimités : concernant les locaux, on est inquiet pour la rentrée. Il faudrait que ces moyens soient fléchés autour d’une véritable réflexion sur la licence, et qu’on arrête d’envoyer tout le monde dans des filières générales.

Instaurer des prérequis, c’est une forme de sélection ?

Oui, il ne faut pas se le cacher. Si l'on dit à un étudiant «tu n'as pas fait d'italien, donc tu ne vas pas en licence d'italien» , c'est une sélection. Mais contrairement aux écoles qui disent «ton dossier n'est pas bon, tu ne rentres pas», l'université dit : «Pour cette filière, tu as toutes les chances de te casser la figure, voilà ce qui te conviendrait mieux.» On ne jette pas les gens à la rue.