La justice s'intéresse au cas de Jean-Luc Mélenchon. Le parquet de Paris a élargi l'enquête sur les soupçons d'emplois fictifs d'assistants au Parlement européen au leader de La France insoumise. Lequel a été eurodéputé de 2009 à 2017. C'est une dénonciation de l'eurodéputée FN Sophie Montel, datée du 27 juin, qui a attiré l'attention de la justice. Selon cette élue, plusieurs anciens collaborateurs de Jean-Luc Mélenchon auraient travaillé pour le Parti de gauche alors qu'ils étaient employés - et donc rémunérés - par le Parlement européen en qualité d'assistants parlementaires. «Jean-Luc Mélenchon se présente comme un chevalier blanc, toujours prompt à donner des leçons aux autres. Aujourd'hui, il est président d'un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale, et un adversaire politique. Pourquoi la justice ne se pencherait-elle pas sur ses anciennes pratiques au Parlement européen comme elle le fait pour nous ?» a justifié Sophie Montel auprès du Parisien, qui a révélé mardi l'élargissement des investigations .
Dénonciation. Cette dénonciation vient nourrir une enquête en cours depuis mars, faisant déjà suite à des accusations de Sophie Montel. La procédure vise les emplois supposés fictifs d'attachés parlementaires de 19 députés de tous bords politiques, notamment du Modem. Elle a déjà entraîné en juin la démission de trois ministres Modem du gouvernement d'Edouard Philippe : François Bayrou (Justice), Sylvie Goulard (Armées) et Marielle de Sarnez (Affaire européennes).
L’office anticorruption devra donc déterminer le travail effectif, ou non, de quatre assistants parlementaires mélenchonistes. Dans sa lettre de dénonciation, Sophie Montel évoque les noms de François Delapierre (ancien bras droit de Jean-Luc Mélenchon mort en juin 2015), d’Aigline de Vincens de Causans, de Laurent Maffeïs et d’Antoine Léaument.
En février, Manuel Bompard, directeur de campagne du leader de La France insoumise, signalait à Marianne qu'Antoine Léaument, responsable de la communication web du candidat, était salarié à temps partiel de l'association de financement de campagne de La France insoumise. «Il travaille à 50 % sur la campagne et à 50 % au Parlement européen», précisait-il à l'hebdomadaire. Du côté de La France insoumise, on estime que ces accusations ne tiennent pas la route. «Aucun de mes assistants n'a jamais exercé de responsabilité politique ni à l'intérieur du Parti de gauche ni pour La France insoumise […] donc je ne sais pas pourquoi on me cherche noise», a réagi lors d'un point presse à l'Assemblée nationale Jean-Luc Mélenchon. Quant à Alexis Corbière, député de Seine-Saint-Denis et bras droit de Mélenchon, il dénonce auprès de Libération «les pratiques de corbeaux du FN, une longue tradition de l'extrême droite».
Contre-feu. Connue au FN pour sa proximité avec le contesté Florian Philippot, et son attachement à la cause animale, Sophie Montel s'est spécialisée ensuite dans la dénonciation de ses collègues parlementaires européens tous groupes confondus. Critiquée par les partis concernés, la démarche de l'eurodéputée du FN est, selon elle, une manière de combattre le «deux poids, deux mesures» dont serait victime son parti. Car le FN est visé par les mêmes soupçons, qui ont entraîné l'ouverture d'une enquête en 2015, devenue information judiciaire début 2017. Portant sur une quarantaine d'assistants, celle-ci a valu une mise en examen à deux eurodéputées frontistes : Marie-Christine Boutonnet et Marine Le Pen elle-même, le 30 juin. Le préjudice du Parlement européen dans cette affaire avoisinerait les 5 millions d'euros, selon l'institution.
Ces dénonciations représentent un utile contre-feu pour le parti d’extrême droite qui, faute de sembler plus vertueux que les autres, voudrait ne pas l’être moins. Reste que ces bons services n’ont pas protégé Montel des règlements de comptes en cours au sein du Front national : en disgrâce, l’élue a récemment perdu son titre de présidente du groupe FN au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, sur consigne de Marine Le Pen.