Creuser un trou pour en combler un autre. C’est un peu la politique que Bercy met en œuvre cet été afin de calmer Bruxelles sur le déficit public. Et avant des coupes budgétaires plus massives encore l’année prochaine, afin de financer les promesses de campagnes de Macron… mais aussi celles de son prédécesseur.
Pour l’heure, la priorité est donc de respecter, partiellement, la promesse faite à Bruxelles de réduire le déficit public de la France pour 2017. Non pas à 2,8 % du PIB, comme prévu, mais a minima en dessous de la barre fatidique des 3 %. Car si rien n’est fait, le déficit devrait frôler les 3,2 %. Or, pour y arriver, il faut trouver 4,5 milliards d’euros. Une somme qui correspond en grande partie, selon la Cour des comptes, à des dépenses déjà engagées mais non financées. Le gouvernement va ainsi s’employer à faire des économies dans certains secteurs… pour payer l’addition dans d’autres. Et ce, à hauteur de 3,3 milliards d’euros de crédits. Même si, pour la plupart, ces sommes avaient déjà été mises en réserve.
Manne
Par le biais de deux décrets, datés du 20 juillet, le gouvernement a ainsi annulé 850 millions d'euros de crédits d'équipement au ministère de la Défense (qui ont entraîné la démission du chef d'état-major), 500 millions à l'Intérieur, 300 millions aux collectivités, ou encore 140 millions consacrés au développement des pays pauvres. Ces 3,3 milliards d'euros seront donc utilisés pour régler des dépenses engagées mais non financées. Et qui, si elles ne l'étaient pas, l'auraient été par l'emprunt, donc par le déficit. Premier bénéficiaire de cette manne : l'opération de recapitalisation d'Areva, pour 1,5 milliard d'euro, mais aussi les opérations extérieures de la France (650 millions) ou encore l'accueil des réfugiés (200 millions). A ces 3,3 milliards d'euros de transferts s'ajoutera 1,2 milliard d'euros d'économies sur les dépenses dites de «guichet», comme les aides au logement. Soit, en tout, les fameux 4,5 milliards d'euros manquants pour faire passer le déficit de 3,2 % à 3 % du PIB cette année.
Engagements
Un tour de passe-passe qui ne devrait pas suffire pour l’an prochain. Le gouvernement devra dégager quelque 20 milliards d’économies s’il veut réduire à 2,7 % le déficit public (son nouvel objectif), mais aussi financer les 11 milliards d’euros de baisses nettes d’impôts. Une réduction de la fiscalité qui comprend, pour 7 milliards d’euros, des engagements pris sous l’ère Hollande (dont le passage du CICE de 6 % de la masse salariale à 7 %, pour 4 milliards d’euros), et pour 7 autres milliards les promesses de campagne de Macron. Dont la première tranche de baisse de la taxe d’habitation (3 milliards), ou encore la limitation de l’ISF aux biens immobiliers (3 milliards). Soit 14 milliards de baisse d’impôts, réduite de 3 milliards par diverses hausses, dont la fiscalité écologique. Où faire ces économies ? Le gouvernement reste vague, parlant de l’Etat pour la moitié du montant (10 milliards), le reste devant échouer à la Sécu et aux collectivités locales. Les tensions ne font que commencer.