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Socialiste

Boris Vallaud, la rose sans les épines

Invité d’honneur de la fête organisée par Arnaud Montebourg, l’ex-secrétaire général de l’Elysée semble épargné par les luttes au PS.
Paris, le 10 juillet 2017. Assemblée nationale. Projet de loi d'habilitation à réformer par ordonnances le dialogue social. SUR LA PHOTO: Boris Vallaud, député socialiste de la 3e circonscription des Landes, co-rapporteur de l'application de la loi. (Photo Albert Facelly.)
publié le 25 août 2017 à 20h46

On connaît la politique comme un monde de requin. Un océan de poissons aux grandes et longues dents, prêts à bouffer le copain d’à côté à la moindre occasion. En pleine convalescence, le Parti socialiste est actuellement bien loin de cette logique. Lorsqu’une nouvelle figure émerge, telle Boris Vallaud, pas question de lui croquer la nageoire. Bien au contraire. Depuis sa victoire lors des dernières élections législatives, dans les Landes, le parlementaire socialiste de 42 ans s’est imposé comme une des figures de l’Assemblée. Ses 52 interventions à la tribune du Palais-Bourbon pour dénoncer la loi travail, son humour grinçant, sa barbe soignée, ses yeux bleus, ou encore ses déclarations tranchantes en tant que porte-parole du groupe Nouvelle Gauche ont marqué les esprits. Au point qu’il est désormais considéré comme une des étoiles montantes du parti.

Dimanche, il sera d'ailleurs l'invité d'honneur de la Fête de la rose à Frangy-en-Bresse (Saône-et-Loire), sorte de prérentrée du PS qu'Arnaud Montebourg a fait renaître ces dernières années. «C'est un peu le Mbappé du PS, sauf qu'il coûte moins cher. Il brille depuis quelques mois, mais il faut qu'il confirme», souffle un cadre de Solférino. Jusqu'ici, le quadragénaire a plutôt tendance à surfer sur les compliments. «C'est le copain de bureau que tout le monde aimerait avoir. C'est une machine énorme intellectuelle. Je n'ai jamais vu une personnalité pareille», lâche Christophe Lantoine, collègue de travail entre 2008 et 2014. «Sympathique père de jumeaux» et surtout «mari de Najat Vallaud-Belkacem», disent les articles à son sujet. «Boris, c'est la France, dans sa splendeur et son humanité», vante sa compagne, dans son dernier livre, la Vie a plus d'imagination que toi. «Je ne suis pas à l'aise pour parler de moi. Je vous préviens, c'est quelque chose que je n'affectionne pas.» Téléphone à l'oreille, Boris Vallaud annonce la couleur d'entrée de jeu. La «transition entre l'ombre et la lumière» ne le lui plaît pas.

«Copain». A l'écouter, le porte-parole n'a jamais eu pour ambition de devenir député. Depuis tout jeune, le Parisien serait plus branché cuisine que politique. «Mon héros, c'est plus Joël Robuchon que François Mitterrand», s'amuse celui qui a redoublé sa seconde. «Aller à la corrida, lire, cuisiner… L'école n'était qu'une priorité parmi tant d'autres», précise-t-il. Son parcours n'en reste pas moins l'exemple type du politique moderne. Après avoir validé un bac B, l'ancêtre du bac ES, l'étudiant enchaîne des études de droit, de sciences politiques, puis l'ENA - promotion Senghor comme un certain Emmanuel Macron. Et même s'il refuse d'intégrer l'Inspection générale des finances - la voie royale - au profit de la préfectorale, le haut fonctionnaire est vite repéré.

Fronde. En 2007, Henri Emmanuelli, député PS dans le Sud-Ouest depuis 1981, «pense à sa succession». Boris Vallaud intègre alors le Conseil général des Landes. Mais un an plus tard, c'est finalement Arnaud Montebourg, député de Saône-et-Loire, qui le récupère. Chargé de redresser les comptes du département, Boris Vallaud suit le futur ministre jusqu'à Bercy, où il devient directeur de son cabinet jusqu'en 2014, puis secrétaire général adjoint de l'Elysée sous François Hollande. Pendant le quinquennat, il réussit la prouesse de passer de la fronde à la hollandie, sans perdre son âme. Un parcours qui, idéologiquement, n'a rien d'incohérent selon le principal intéressé : «J'ai toujours collaboré avec des hommes de gauche, c'est la seule chose importante. François Hollande savait que j'étais proche d'Henri Emmanuelli. A aucun moment ça ne nous a empêchés de travailler ensemble, explique-t-il. Je refuse d'être mis dans une case ou de me définir par rapport à telle ou telle personne. Le seul véritable adversaire, c'est la droite et ses idées ultralibérales.»

Désormais député, car «préoccupé par la montée en puissance de l’extrême droite», Boris Vallaud ne veut pas parler d’avenir. L’homme prétend regarder «de l’extérieur» la reconstruction de son parti, pour se concentrer sur sa tâche dans l’hémicycle. A Solférino, c’est plus le nom de Najat Vallaud-Belkacem qui circule pour prendre la direction du parti. «Il ne se met pas assez en avant, voilà un de ses défauts ! Son extrême modestie le handicape», murmure un membre de son entourage. Ce serait donc ça, la limite de Boris Vallaud. L’énarque ne serait pas«assez politique» mais «trop altruiste et technocrate». Pourtant, comme le rappelle le membre de la direction provisoire du PS, François Kalfon, «la politique, c’est comme le cyclisme. C’est un sport d’équipe, mais aussi individuel. Pour durer, il faut réussir à jouer sur les deux tableaux».