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Economie

Dividendes : la grogne des grands patrons a fini par payer

Fin juillet, les principaux groupes français obtenaient l’annulation d’une taxe de 3% sur les dividendes votée par la gauche en 2012. Mais le gouvernement étudie des pistes pour les imposer autrement.
A l'université d'été du Medef, le 29 août. (Photo Eric Piermont. AFP)
publié le 29 août 2017 à 20h16

Ils y ont cru. Devant les sénateurs le 20 juillet, le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a fait une promesse aux grands patrons : «La contribution de 3 % sur les revenus distribués [aux actionnaires par les grandes entreprises] sera elle aussi supprimée.» Une victoire pour le Medef qui bataille depuis 2012 pour supprimer cette taxe votée par la gauche dès l'été de son retour au pouvoir pour combler un manque à gagner dans les caisses de l'Etat. Les grands patrons - les PME étaient exemptées de cette contribution - ferraillent en justice depuis cinq ans, estimant «inconstitutionnel» et «contraire au droit européen» un impôt sur les dividendes versés par une société à ses actionnaires. Avec succès : le Conseil constitutionnel a déjà censuré partiellement la loi en septembre 2016 et le 17 mai 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a retoqué en grande partie cette disposition. La requête avait été portée par de grands groupes français comme Axa, Michelin, Danone, Total, Vivendi, Orange ou encore Sanofi. Selon les juges de Luxembourg, la loi française contrevient ainsi à une directive européenne dite «mère-fille» qui empêche la double imposition des sociétés mères sur les bénéfices de leurs filiales. Résultat, les contentieux s'accumulent et l'Etat pourrait avoir à rembourser de 5 milliards à 6 milliards d'euros. L'exécutif a donc décidé d'arrêter les frais en supprimant cette mesure dans la prochaine loi de finances. Sauf que… cette contribution rapporte 2 milliards d'euros chaque année aux caisses de l'Etat. Or, pour tenir son engagement d'un déficit public à 2,7 % du PIB en 2018, le gouvernement a prévu 20 milliards d'euros d'économies, tout en baissant les impôts de 10 milliards à 11 milliards d'euros…

Du coup, le gouvernement réfléchit à une mesure «temporaire» sur «les grandes entreprises de plus d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires». Selon la presse économique, Bercy travaille à plusieurs hypothèses, dont l'augmentation «temporaire» - trois ans, selon le Figaro - de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Cette taxe qui s'applique aux sociétés faisant plus de 19 millions d'euros de chiffres d'affaires devait être pourtant supprimée sous Hollande. Mais l'ex-chef de l'Etat y avait renoncé sous la pression de sa majorité déjà ébranlée par la loi El Khomri et qui ne souhaitait pas, avant les élections, faire ce nouveau cadeau aux grands patrons.

Autre piste de Bercy : l'augmentation de l'impôt sur les sociétés (IS) pour les seules grandes entreprises. Ce qui serait en totale contradiction avec la promesse d'Emmanuel Macron dans sa campagne de baisser l'IS à 25 % d'ici la fin du quinquennat. Selon les Echos, l'exécutif pourrait aussi revenir sur certaines déductions d'impôts pour les grands groupes et refiscaliser certaines dépenses de recherche et développement, par exemple. Autant de casus belli pour un Medef qui n'entend faire aucun cadeau au ministre de l'Economie et des Finances qui viendra, ce mercredi, clôturer leur université d'été.