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Libération
Décryptage

Catastrophe naturelle : quels remboursements pour les touristes ?

Après Irma, Mariadossier
Beaucoup de touristes devant se rendre aux Antilles au mois de septembre ont dû renoncer à leurs vacances à cause du passage d'Irma. Mais doivent-il renoncer aux frais qu'ils ont engagés ?
A l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, à Paris. (Photo Bertrand Guay. AFP)
publié le 11 septembre 2017 à 19h51

L'ouragan Irma a dévasté les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy avant de continuer ses dégâts sur à travers les Caraïbes puis en Floride. Or des milliers de voyageurs devaient se rendre dans la région en ce mois de septembre. Alors que les événements météorologiques extrêmes s'annoncent de plus en plus fréquents en raison du dérèglement climatique, comment les professionnels du voyage gèrent-ils la situation quand les vols sont annulés ?

Remboursement ou report du voyage

Pour les vols européens, en cas d'annulation de vol, les choses sont assez claires : les passagers doivent être pris en charge par les compagnies aériennes et ont le choix entre le remboursement de leur vol, ou le réacheminement ultérieur vers leur destination. Un voyageur en correspondance dont le vol est annulé bénéficiera de la prise en charge de son vol retour vers son point de départ. Tout cela sans frais et même si les voyageurs n'ont souscrit à aucune assurance spécifique. Cela relève de la législation européenneune décision qui faisait suite à l'annulation de 100 000 vols à cause de l'éruption du volcan islandais Eyjafjallajökul, en 2010.

Le site du ministère de la Transition écologique précise également que le transporteur doit prendre en charge le passager si ce dernier doit attendre un réacheminement : «rafraîchissements, restauration, deux communications, et si le départ ne peut pas avoir lieu avant le lendemain, hébergement et transferts entre le lieu d'hébergement et l'aéroport».

Pour les voyageurs qui auraient fait appel à une agence de voyage fournissant le vol en plus de l'hébergement, «la question sera de savoir si on est dans un cas de force majeure, donc imprévisible, irrésistible et extérieur», précise Laurence Jégouzo, avocate du site Voyage privé, spécialisée dans le droit du tourisme. Auquel cas les voyageurs seront remboursés par leur tour opérateur, lequel pourra se retourner contre la compagnie aérienne pour le remboursement du vol. «En l'espèce, la politique est plutôt de rembourser, mais cela peut poser problème pour les petites agences de voyage. Lors de l'épisode du volcan islandais, l'Etat avait dû mettre en place un médiateur pour régler les litiges, et on peut aussi imaginer qu'un fonds public soit mis en place pour aider les entreprises à assurer ces remboursements», poursuit la juriste.

En attendant, les voyagistes semblent plutôt conciliants. Libération a notamment eu connaissance d'une voyageuse française qui devait se rendre en séjour à La Havane (Cuba), vendredi. Après avoir refusé d'embarquer dans un des derniers vols autorisés à partir sur l'île, et insisté auprès de son opérateur, elle a finalement obtenu la promesse que son séjour serait reporté à une date ultérieure.

Aucun vol vers Saint-Martin

En France, les compagnies Air France et Air Caraïbes étaient, lundi, dans l'impossibilité de déterminer le nombre de voyageurs susceptibles d'être remboursés. Mais tous les vols en direction de Saint-Martin ont été annulés depuis le 5 septembre, l'aéroport n'étant actuellement pas en mesure d'accueillir des vols commerciaux. Et ce pour une durée indéterminée. Les voyageurs qui devaient prendre ces vols annulés seront donc tous remboursés ou pourront reporter leur voyage.

«Avec Irma, la situation est complexe : vols empêchés, voyageurs qui veulent annuler ou être remboursés, avions de fret pour transporter des marchandises, voyageurs qui veulent quitter la zone», les vols pourraient bien être perturbés pendant plusieurs semaines explique-t-on du côté d'Air Caraïbes (voir la liste des remboursements), et de nouvelles réservations de remplacement pourront courir jusqu'au 30 juin 2018. «Nous avons mis en place des mesures commerciales. Si le vol est annulé, le remboursement est total et sans frais. Jusqu'au 17 septembre au moins, il n'y aura pas de vol vers Saint-Martin», confirme-t-on du côté d'Air France. «Ces consignes sont susceptibles d'être étendues, et des réunions sont en cours», assure la compagnie. Des reports sans frais sont aussi proposés aux voyageurs qui devaients se rendre avant la fin du mois de septembre dans le nord des Caraïbes et la Floride (voir le détail ici). «Chaque catastrophe étant singulière, il n'y a pas de critère arrêté. On met systématiquement en place des mesures commerciales, les conditions de report et de remboursement s'assouplissent le temps nécessaire. Et on s'adapte au cas par cas. Ces situations sont toujours compliquées à gérer mais on n'est pas dépassés, on gère des aléas toute l'année», explique le porte-parole, sans être en mesure de préciser pendant combien de temps s'étendront ces mesures.

Le voyagiste Look Voyage expliquait la semaine dernière avoir mis en place une «cellule de crise» et promettait que, pour les voyages à destination de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, «tous les départs à venir jusqu'à fin décembre 2017 peuvent être reportés sans frais sur une autre date ou une autre destination […] dans un délai maximum de 6 mois». Les clients à destination des Bahamas et de la Floride «ont été dirigés vers d'autres régions ou rapatriés par anticipation» et ceux qui se trouvaient à Cuba ont dû être déplacés si leur chambre était trop proche de la mer et invités à «rester dans leur chambre».

Indemnisations supplémentaires

Au-delà du remboursement, les voyageurs peuvent-ils espérer des indemnités ? Pas vraiment. Le droit européen prévoit bien une indemnisation en cas d'annulation, qui s'élève à 600 euros au-delà de 3 500 kilomètres de distance, comme le rappelle Que choisir. Sauf que cette obligation peut être levée si l'annulation a eu lieu deux semaines ou plus avant le départ prévu ou si l'annulation du vol est due à une «circonstance extraordinaire». En l'occurrence, il semble probable que les compagnies argueront que l'ouragan Irma relevait bien d'une «circonstance extraordinaire» qu'il était impossible d'éviter pour s'exonérer de l'indemnisation. A noter toutefois, le magazine de droit des consommateurs rappelle que les compagnies aériennes ne peuvent «vous régler sous forme d'avoir ou de bon d'achat qu'avec votre accord écrit».

Côté assurances, la classification «catastrophe naturelle» inscrite depuis vendredi au Journal officiel concernant Irma, est une garantie qui concerne seulement la prise en charge des dommages matériels directs causés aux biens assurés (bâtiments, voitures…). Quant aux assurances annulation, elles ne couvrent que les annulations dues au passager - qui ne seront pas prises en charge pas la compagnie : maladies, décès d'un proche, impératifs professionnels…