Des milliers de personnes ont défilé samedi après-midi à Paris, à l’appel de Jean-Luc Mélenchon, pour dire non au «coup d’Etat social» que constitue selon La France insoumise, la réforme du Code du travail.
Massés aux abords de la place de la Bastille, les manifestants, avec pancartes («Y'a rien de bon dans le Macron» ou encore «Les fainéants dans la rue») et banderoles, ont marché vers la place de la République, à moins de deux kilomètres de là, où Jean-Luc Mélenchon a prononcé un discours. «Personne ne nous a jamais parlé sur ce ton», a-t-il commencé, rapport notamment, à la déclaration de Macron sur les fainéants. Dans une volonté de ratisser large, il a ainsi lancé un appel à tout ceux qui n'acceptent pas qu'on leur parle ainsi.
Une foule compacte - répartie sur la partie est de la place de la République - attend Mélenchon #manif23septembre pic.twitter.com/8Sla0LAjii
— Vincent Daniel (@VincentDanie_l) September 23, 2017
Il a ensuite répliqué à Emmanuel Macron pour qui «la démocratie, ce n'est pas la rue», paraphrase à l'appui : «c'est la rue qui a abattu le rois, c'est la rue qui a abattu les nazis». Et de lister les congés payés, l'augmentation du smic, la loi Devaquet, le plan Juppé. «C'est la rue toujours qui porte les aspirations du peuple français lorsqu'il ne peut les faire entendre autrement.»
Surtout, le chef des insoumis a appelé les syndicats à l'unité. «Avant la ratification des ordonnances par le Parlement, je souhaite, avec les organisations syndicales, et nous sommes prêts à nous ranger derrière elle, une action forte et dense», a-t-il lancé, en évoquant la possibilité de «déferler à un million sur les Champs-Elysées». «La bataille n'est pas finie, elle commence», a-t-il déclaré sous les cris de «résistance» scandé par les manifestants. A ces derniers, il a recommandé de faire des «casserolades». Comprendre : «Vous allez aller avec des casseroles faire le plus de bruits possible là où vous croyez bon de le faire». «Vous nous empechez de rever alors nous vous empechons de dormir», a-t-il justifié.
Au passage, il n'aura pas manqué de critiquer les médias qui travaillent «pour le portefeuille» des plus riches, les cris passant alors de «résistance» à «dégager».
Un mot d'ordre élargi
Après une mobilisation syndicale en retrait jeudi, le mot d'ordre avait été en élargi à l'ensemble des initiatives politiques du gouvernement depuis quatre mois, résumées par l'expression choc de «coup d'Etat social». Après avoir longtemps parlé de la hiérarchie des normes, reconnaissant que le sujet était technique mais indispensable, il a également parlé du logement, des retraités, des emplois aidés, ou encore du CETA et de l'Europe. «Le pire adversaire autoritaire est le capitalisme», a-t-il résumé.
Autre punchline made in Macron : « Les vrais feignants sont au gouvernement » #manif23septembre pic.twitter.com/mXCGb0ZZ8X
— Vincent Daniel (@VincentDanie_l) September 23, 2017
Selon la France insoumise, la manifestation a rassemblé 150 000 personnes quand la police parle de 30 000 personnes. Les organisateurs espéraient une participation équivalente à celle de la «Marche pour la République» du 18 mars, soit environ 130 000 personnes. De nombreux cars avaient été affrétés en provenance de toute la France.
Nous sommes 150 000 rassemblés contre le coup d'État social d'Emmanuel Macron ! Quelle mobilisation ! #JaiBastille pic.twitter.com/0ifjcVz8i3
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) September 23, 2017
Légitimité contestée
Alors que Les Républicains, le Parti socialiste et le Front national connaissent de grandes difficultés internes, Jean-Luc Mélenchon entendait ainsi faire la démonstration qu’il est le seul, avec son groupe de 17 députés insoumis, à pouvoir incarner l’opposition à la politique d’Emmanuel Macron dans son ensemble. Le chef de l’Etat est, aux yeux de la France insoumise, un président mal élu, porté au pouvoir au terme d’un second tour où l’objectif de nombreux électeurs était avant tout d’éliminer Marine Le Pen. Jean-Luc Mélenchon et ses troupes contestent également sa légitimité sur la réforme du Code du travail et les autres mesures de «casse» sociale que l’élection présidentielle n’a pas validées dans les urnes selon eux.
Face à cette initiative inédite, la gauche a répondu en ordre dispersé. Fâché avec La France insoumise, le Parti communiste français n’a envoyé qu’une délégation place de la Bastille. Son secrétaire national, Pierre Laurent est tout de même venu saluer Jean-Luc Mélenchon.
Pierre Laurent sera sur la place de la Bastille à 14 heures pour saluer Jean-Luc Mélenchon.
— Laïreche Rachid (@RachidLaireche) September 23, 2017
Le vainqueur de la primaire PS Benoît Hamon et son mouvement du 1er juillet (M1717) était également présent, comme dans les deux journées d’action précédentes de la CGT. Il était d'ailleurs dans le carré de tête du cortège, juste à côté de Jean-Luc Mélenchon. L'Emmanuel Maurel et son courant «Maintenant la gauche» était aussi sur place. Le PS cependant n'avait pas appelé formellement à manifester, tout comme EELV.
Dans le cortège de tête de la marche contre "le coup d'État social",on retrouve notamment Hamon et Emmanuel Maurel #JaiBastille #23septembre pic.twitter.com/VuyNtCBuQ7
— Chabrout Julien (@JulienChabrout) September 23, 2017
À Bastille contre le coup d'état social du gouvernement ! #JaiBastille #23septembre pic.twitter.com/xe1Z5PBtHX
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) September 23, 2017
«Les vrais insoumis»
De brefs incidents ont par ailleurs éclaté entre militants radicaux des «black blocs» et des partisans de Jean-Luc Mélenchon. En arrivant place de la République, quelques dizaines de militants radicaux autonomes, vêtus de noir et visages masqués, ont couru vers la scène, où ils ont arraché des affiches de la France insoumise. Certains ont jeté des projectiles sur la scène. Des partisans de Jean-Luc Mélenchon les ont hués.
En marge de la manifestation, des jeunes vêtus de noir scandaient des slogans contre la police ou encore «Ni Dieu, ni maître... ni Mélenchon» et agitaient des banderoles «Le travail tue, mort sur ordonnance». Avant la manifestation, a circulé sur internet un appel de la mouvance autonome, appelant à s'inviter en tête du cortège et «montrer que c'est (eux) les vrais insoumis».