Jeudi prochain, les adhérents de LR auront élu leur nouveau chef de file. Depuis mardi, quatre prétendants sont officiellement sur la ligne de départ, mais un fait figure d’archifavori. Laurent Wauquiez, selon toute vraisemblance, devrait être le nouveau patron du parti de la droite au terme d’une élection interne appelant aux urnes les encartés de la formation de la rue de Vaugirard.
Leur nouveau président aura au moins trois chantiers devant lui. Redéfinir d'abord ce qu'est la droite alors que les principales réformes lancées par le président de la République et son gouvernement, à commencer par la loi travail ou la quasi-suppression de l'ISF, correspondent à ce qu'elle réclame depuis toujours sans jamais l'avoir fait. Le deuxième défi sera d'incarner la voix de l'opposition face à Macron sans rebuter les 69 % de sympathisants LR qui attendent de leur nouveau leader une attitude «constructive» à l'égard du pouvoir, mais sans se couper non plus de son noyau dur nostalgique d'une droite buissonnière. Comprendre à la mode de Patrick Buisson, inspirateur volontiers maurrassien de la doctrine sarkozyste. Le troisième défi sera de maintenir l'unité de la vielle maison héritée du gaullisme, d'être de droite sans donner l'impression de flirter de trop près avec un Front national lui-même en pleine dégauchisation. «Pour la première fois dans ce parti, il va nous falloir faire une synthèse à la mode PS. Autant dire que ce n'est pas dans notre culture», sourit un élu LR parisien.
«Aucune valeur»
Le candidat Wauquiez va donc être contraint de tenir les deux bouts de la corde. Dès la parution de la tribune du président de Sens commun, Christophe Billan, proposant une plateforme commune à toutes les droites jusqu'à Marion Maréchal-Le Pen, le président de la région Auvergne-Rhônes-Alpes lui a claqué la porte au nez. «S'il y a le moindre passage à l'acte, ils n'auront plus leur place chez Les Républicains. Notre famille a besoin de retrouver de la clarté», a tranché le candidat à la présidence de LR. De la même manière, il vient de refuser de débattre avec la présidente du FN, Marine Le Pen. Pourtant en août, lors d'un meeting dans les Bouches-du-Rhône, il se revendiquait «d'une droite vraiment de droite», considérant que celle-ci n'aurait «jamais dû perdre cette présidentielle. Mais ce ne sont pas nos valeurs qui ont perdu».
Les opposants à la candidature Wauquiez brandissent comme preuve des ambiguïtés du favori le choix annoncé de Virginie Calmels et Guillaume Peltier comme ses deux futurs vice-présidents. La première adjointe au maire de Bordeaux, soutien d'Alain Juppé, incarne une droite libérale et européenne. Elle se retrouve sur le flanc gauche de Wauquiez, jurant que celui-ci est plus proche de Macron que de Le Pen. Quant au second, député du Loir-et-Cher, passé par le FN puis le MPF de Philippe de Villiers et qui vient de monter au sein de LR un courant baptisé «Les Populaires», il est censé tenir le flanc droit, «celui d'une droite parlant au peuple, aux ouvriers et aux fonctionnaires qu'elle a délaissés au profit de considérations techniques et comptables». «Ces deux vice-présidences montrent bien que ce type n'a aucune valeur, aucune colonne vertébrale. Il peut dire tout et son contraire», tacle un proche de Florence Portelli, la maire de Taverny et candidate elle aussi à la présidence de LR.«Tout l'enjeu de cette élection est de choisir quelle droite on veut afficher, quelle droite on veut montrer face à la manière nouvelle de faire de la politique incarnée par Emmanuel Macron», observe Florence Portelli, peu convaincue par la synthèse opportuniste d'un Wauquiez.
Haines tenaces
Au sein de LR, ils sont un certain nombre à trouver que Laurent Wauquiez fait de la politique «à la papa», avec des règles très vieille école et fort peu de scrupules. De quoi susciter des haines tenaces. Et chacun comprend bien que s'il prend le parti, c'est pour porter les couleurs de la droite en 2022. «En cela, il ne fait que suivre l'exemple de Nicolas Sarkozy, qui l'a mis sur les rails en 2014, constate un député, ancien soutien de Juppé à la primaire. Wauquiez aussi considère que tout ceux qui ne sont pas avec lui sont contre lui». Alors qu'une attitude d'ouverture vis-à-vis du gouvernement séduit non seulement les sympathisants LR mais également un grand nombre de cadres du parti, Laurent Wauquiez la considère comme «inamicale» à sa candidature. D'où son intransigeance à l'égard des ex-LR baptisés «constructifs» qu'il considère comme des «traîtres» et dont il réclame l'exclusion quand d'autres, soucieux d'éviter un recroquevillement de la droite, sont enclins à plus de mansuétude à leur égard.
Pour que cette stratégie de prise du parti ait un sens, il fallait que la droite perde en 2017, de façon à ce que le prochain patron de LR puisse incarner le renouveau et se positionner pour 2022. Ses concurrents ne manqueront certainement pas dans cette fin de campagne de rappeler que Laurent Wauquiez n’a fait reposer son ambition personnelle qu’en misant sur la défaite de son camp, puis sur l’échec du quinquennat.
Maël de Calan
A 36 ans, ce Breton est le benjamin de la compétition. Il y portera surtout le flambeau juppéiste, opposant sa «droite ouverte» à la radicalité d’un Wauquiez qu’il juge «minoritaire» dans son camp. Revendiquant d’adhérer «à plusieurs propositions que porte Macron», il s’oppose à l’exclusion des députés LR «constructifs».
Florence Portelli
Mal connue du grand public, la seule femme de la compétition a pourtant été parrainée par plus de 5 000 adhérents LR, le deuxième meilleur total. Elue maire de Taverny (Val-d’Oise) en 2014, elle fut porte-parole de François Fillon, qu’elle a soutenu jusqu’au bout de sa campagne présidentielle.
Daniel Fasquelle
Le député du Pas-de-Calais est, avec Wauquiez, l'autre sarkozyste de la compétition. Cet ancien trésorier de l'UMP veut «redresser le parti après avoir redressé les comptes». Qualifié de justesse, Fasquelle n'inquiète pas le favori Wauquiez : grand prince, celui-ci avait même appelé à parrainer ce rival plutôt bienveillant. D.Al.