Le parcours est le même pour nombre de femmes SDF à Paris : appel au 115 durant la journée, pour tenter d’obtenir une place d’hébergement. Puis, pour celles, nombreuses, n’ayant pas obtenu de lit, direction la Villette, dans le nord de la capitale, afin de prendre l’un des deux bus qui les transporteront au centre d’hébergement et d’assistance aux personnes sans abri pour femmes et hommes (Chapsa) de Nanterre. Dans le véhicule mixte, les femmes rapportent régulièrement les insultes des hommes, voire les attouchements. Et pour celles qui, faute de place, ne pourront se rendre au centre, il reste la rue, les urgences d’hôpitaux, les gares… Chaque jour, trois femmes seules sur quatre (soit entre 60 et 100 personnes) ne trouvent pas de logement, selon le Samu social de Paris, qui vient de lancer sa campagne hivernale axée sur la précarité des femmes SDF (#LaRueAvecElles). En 2016, elles étaient 5 391 à avoir appelé au moins une fois le 115 de Paris (+ 66 % en dix ans). Des femmes particulièrement vulnérables au vu du nombre d’agressions dont elles font l’objet (une SDF agressée toutes les huit heures en France).
A bout de force. Grâce à une étude réalisée avec l'accueil de jour la Halte femmes, le Samu social de Paris s'est aperçu qu'un nombre croissant d'entre elles (parmi celles qui appellent le numéro d'urgence) préfèrent finalement s'organiser par leurs propres moyens, lassées de ne pas trouver d'hébergement. «Lorsqu'on arrive à rappeler les femmes qui nous contactent, elles nous disent souvent "c'est bon, je me suis débrouillée", précise le directeur de la communication du Samu social Stéphane Delaunay. C'est pour explorer ces systèmes de débrouille qu'on a décidé de mener cette étude avec pour but d'alerter les pouvoirs publics. Nous avons recueilli une centaine de témoignages. Elles sont toutes d'accord pour dire que les solutions d'hébergement ne sont pas adaptées : elles sont à bout de force, certaines ont arrêté de faire les allers-retours en bus de nuit, de peur d'être violées, d'autres se plaignent des attentes pénibles aux urgences. Elles n'en peuvent plus, ne supportent plus cette incertitude tous les soirs.»
Dons. Dans le cadre de la campagne #LaRueAvecElles, le Samu social lance un appel aux autorités en insistant sur l'adaptation aux besoins des offres d'hébergement : demande la création de 100 places d'accueil de nuit en urgence réservées aux femmes, et de 250 places de jour comme de nuit. Cette structure serait dotée d'un ensemble de services (aide juridique, consultation infirmière, psy, assistante sociale) visant à leur apporter une assistance immédiate, faire valoir leurs droits et les orienter vers une structure adaptée. Réserver un bus non mixte à destination du centre de Nanterre, avec des équipes formées aux spécificités des femmes sans abri, figure aussi dans la liste des dispositifs envisagés. Autre priorité : améliorer le repérage des femmes SDF. La Halte femmes et le Samu social souhaitent renforcer les maraudes en soirée dans les lieux où elles trouvent refuge (urgences, gares, abris de bus…) et mettre en place un observatoire de la précarité des femmes. Un appel aux dons a été lancé sur Internet.