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Libération
Maltraitances

Corrida, chasse à courre, animaux de cirque : la SPA montre les crocs au pénal

La plus ancienne des associations de protection animale a présenté jeudi matin son «offensive judiciaire» contre plusieurs pratiques relevant de la cruauté animale, dont la tauromachie, les conditions d'abattage ou les fermes à fourrure.
Le matador espagnol Juan Del Alamo exécute un pas avant la mise à mort d'un taureau le 17 septembre pour la feria des vendanges de Nîmes. (Photo Sylvain Thomas. AFP)
publié le 9 novembre 2017 à 16h21

La Société protectrice des animaux (SPA) monte au front contre les «pratiques barbares» visant les animaux. Déplorant un «décalage» entre l'opinion et «la réalité juridique de notre pays», l'association de défense animale, créée en 1845 pour protéger les chevaux des maltraitances infligées par les cochers parisiens, a annoncé ce jeudi se lancer dans «offensive judiciaire» pour mettre fin à des «pratiques d'un autre siècle» comme la chasse à courre et la corrida. Un terrain inhabituel pour la SPA, selon sa présidente Natacha Harry, «les campagnes d'affichage ou les pétitions [ayant] atteint leurs limites».

Quels sont les tenants et les aboutissants de ce «plan d'action» présenté jeudi au siège parisien de l'association ? D'abord, des procédures au pénal visant à interdire en France la tauromachie et la chasse à courre. L'organisation a ainsi déposé une première plainte le 30 octobre au tribunal de grande instance (TGI) de Compiègne contre Alain Drach, maître d'équipage, pour «sévices graves et actes de cruauté» après l'abattage d'un cerf de deux coups de fusil dans un jardin de Lacroix-Saint-Ouen (Oise) où l'ongulé avait trouvé refuge. «Cette pratique n'a rien d'écologique, c'est un pur divertissement qui relève de la féodalité et doit être aboli comme au Royaume-Uni», plaide Eric Gaftarnik, secrétaire général de la SPA et avocat au barreau de Paris de profession.

«Actes de barbarie»

Lundi, l'association a également déposé une plainte générale contre X, devant le procureur de Paris pour «sévices graves et actes de cruauté» – un fait puni de deux ans de prison et de 30 000 euros d'amende selon l'article 521-1 du code pénal –  afin d'obtenir à terme l'interdiction des corridas, toujours autorisées dans dix départements du sud de la France. Pour parvenir à ses fins, la SPA compte alors attaquer sur le terrain de la sémantique en contestant l'interprétation de l'exception accordée aux «courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée». 

«Une course de taureaux, c'est une course de taureaux tandis qu'une corrida, c'est mise à mort précédée d'actes de barbarie», conteste à ce propos Eric Gaftarnik, qui menace par ailleurs les municipalités et sociétés organisatrices de citation directe. Thierry Hély, président de la Fédération des luttes pour l'abolition des corridas (Flac), à Agde le rejoint : «On doit tout faire pour mettre fin à cette pratique, cette plainte fait partie de cette stratégie, même si les taurins peuvent toujours dire que l'animal court dans l'arène.»

Faire pression sur le monde politique

La Société protectrice des animaux a d'autres maltraitances dans le collimateur. L'exploitation des animaux de cirque, à laquelle s'est opposé publiquement début août le ministre de la Transition écologique, mais aussi les conditions d'abattage, dévoilées par les vidéos choc des activistes de L214 et pour lesquelles la SPA veut «un étiquetage clair» pour le consommateur, les fermes à fourrure ou l'épineuse question de l'expérimentation sur les animaux de laboratoire qu'elle veut porter devant la justice européenne.

«Malgré la présence de Nicolas Hulot au gouvernement, on en reste au stade de l'indignation, déplore la présidente de la SPA, Natacha Harry. Il faut forcer le monde politique à agir pour qu'à l'évolution de la société succède l'évolution législative.» Rappelons qu'en 2015 le législateur a modifié le code civil pour ne plus faire des animaux des «biens meubles» mais des «êtres vivants doués de sensibilité», ouvrant selon l'avocat de la SPA, «des perspectives judiciaires». «La société est prête mais la France est très en retard en matière de protection animale», regrette encore Eric Gaftarnik. Aux juges désormais, de trancher.