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Libération
Billet

Main au kilt dans «Nouvelle Star» : oui, ceci est une forme d’agression sexuelle

publié le 16 novembre 2017 à 20h06

Mercredi, M6, 21 h 30. Les candidats défilent devant le jury de Nouvelle Star, cette année composé de Benjamin Biolay, Cœur de pirate, du compositeur-producteur Dany Synthé, et de la conseillère en images pour artistes Nathalie Noennec. Après avoir travaillé pendant vingt ans pour la maison de disques Virgin, la dame officie désormais à son compte, elle a rejoint le télécrochet via son ami Benjamin Biolay. Jusqu'ici, RAS - même les esprits les plus purs conviendront que l'image, l'allure d'un chanteur peut influer sur son succès.

Problème : mercredi soir, lors des auditions, Nathalie Noennec s'enflamme devant un kilt porté par Benoît, un candidat. Alors qu'il s'apprête à interpréter sa chanson, elle lâche : «Parfois, mes collègues font des vérifications techniques. Ce sont des musiciens, des producteurs. Là, je vais être obligée.» Et de se lever pour aller vérifier si le jeune homme est nu ou pas sous la jupe traditionnelle écossaise. Elle se met à côté de Benoît : «Je fais un contrôle technique léger, je passe par l'arrière comme ça.» Elle lui tâte le derrière. Et ajoute : «Ça n'influencera pas ma réponse, je pense, mais comme c'était visuellement fort.» Outre la victime qui sursaute, on note la gêne des jurés, yeux ronds. Biolay soupire : «Non non non, tu regardes pas s'il y a un truc en dessous à la télé.» Illico, Twitter s'emballe, femmes et hommes confondus. Exemple type des réactions : «Si un homme avait fait le même geste que Nathalie Noennec, ça aurait fait le plus gros scandale du monde. Ça aussi, c'est du harcèlement, madame !» Jeudi matin, on apprenait que le CSA a reçu «plusieurs dizaines de saisines» de téléspectateurs. Le gendarme de l'audiovisuel va maintenant «examiner ces plaintes et la séquence en question afin de voir s'il y a lieu de déclencher une instruction». Y aurait-il emballement disproportionné ? Les téléspectateurs choqués ne confondent-ils pas tout, hystérisés par l'ambiance #balancetonporc ? Non. Ce tripotage est bel et bien une forme d'agression sexuelle, aussi soft qu'elle puisse paraître. Aucun individu n'a le droit d'en toucher un autre sans son consentement. En outre, son geste était celui d'un maquignon, qui tâte la bête pour voir si elle vaut l'achat. Le candidat s'en est retrouvé homme-objet, sa liberté de disposer de lui-même allègrement piétinée. Et peu importe qu'il n'y ait pas eu intention de nuire, ou que le geste ait été furtif. Peut-être même que l'intéressée (ni elle ni M6 n'ont pour l'instant réagi) invoquera, penaude, une maladresse. Il demeure que toute personne opposée au harcèlement sexuel ne peut que dénoncer ce tripotage.

En pleine période post-Weinstein, les hommes sont en ligne de mire, le harcèlement sexuel faisant une majorité de victimes féminines. Mais le geste de Nathalie Noennec vient rappeler que les femmes aussi peuvent déraper. Et qu’au-delà de la libération de la parole, il reste à l’évidence beaucoup de boulot pour que le harcèlement sexuel, sous ses différentes formes, intègre le rayon des interdits dans toutes les consciences.