Attention sujet glissant… La proposition de loi du Modem instaurant la résidence alternée des enfants en cas de divorce comme le principe numéro 1 était débattue mercredi en commission des lois à l'Assemblée. Et c'est peu de dire que les députés y sont allés à tâtons. Voire à reculons pour l'opposition. «Le débat est passionnel parce que nous touchons à un problème sensible», reconnaît le rapporteur du texte, Vincent Bru (Modem), tandis que son auteur, Philippe Latombe (Modem), a pris des pincettes, soulignant qu'il ne comptait pas «opposer les parents entre eux». «L'objectif n'est pas de définir la garde alternée comme obligatoire ou automatique», assure-t-il.
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Les députés de La France insoumise, les communistes, la Nouvelle Gauche ou Les Républicains ont, eux, enchaîné les mises en garde. Un texte qui s'apparente à «une aventure hasardeuse», avertit Thibault Bazin (LR). Estimant que «le dispositif actuel, bien que perfectible, fonctionne bien», Danièle Obono (FI) dénonce une «proposition de loi mal préparée, voire dangereuse» et soulève les cas de violences conjugales ou familiales pas assez prises en compte selon elle. «On va agiter le chiffon rouge devant des mamans très inquiètes sans s'assurer que l'intérêt supérieur de l'enfant est là», craint la socialiste Cécile Untermaier. Même Laurence Vichnievsky (Modem) a exprimé sa «réserve» sur le texte porté par son groupe qui, à ses yeux, «manque de réalisme» et comptait s'abstenir. D'autres ont pointé les effets d'une généralisation du principe de résidence alternée pour les tout-petits.
Conscient des inquiétudes, le rapporteur Vincent Bru se veut «très prudent» : «On veut surtout donner une orientation pour faire prendre conscience que les deux parents ont une coresponsabilité et les mêmes devoirs.» Avec celui-ci, Caroline Abadie, référente sur le sujet pour le groupe LREM, a déposé de nombreux amendements alors que le texte ne comportait qu'un article. Par exemple, pour rajouter un alinéa sur les violences et renforcer «le rôle du juge au cœur de la décision», afin que celui-ci continue d'apprécier les situations au cas par cas. Les défenseurs du texte ont multiplié les précautions, rappelant qu'il ne s'agissait pas d'instaurer un partage de temps égal entre l'hébergement chez la mère et le père ou que «l'intérêt supérieur de l'enfant» primerait toujours. Le président du groupe LREM, Richard Ferrand, a insisté sur ce point, mardi sur France Inter : «L'essentiel est que le juge, après avoir regardé chaque situation familiale prenne la décision qui est bonne pour l'intérêt de l'enfant.»
Après avoir encadré le texte, les députés LREM l'ont adopté avec leurs collègues centristes, sans les voix des autres groupes, guère rassurés par des corrections rajoutées «à la va-vite». La proposition doit être discutée le 30 novembre, dans le cadre de la niche réservée au Modem. C'est aussi ce qui gêne l'opposition. «C'est surtout un problème de méthode. On n'a pas d'étude d'impact, ce n'est pas rien de modifier le code civil par une proposition de loi dans une niche, sur une question aussi majeure», prévient Cécile Untermaier.