Sans cesse annoncé, sans cesse remis au lendemain, le troisième remaniement de l’ère Macron aura mis une semaine à se concrétiser pour tomber vendredi soir via un communiqué. Le socialiste Olivier Dussopt et Delphine Gény-Stephann, une des dirigeantes de Saint-Gobain, font leur entrée comme secrétaires d’Etat à Bercy.
C'est l'arrivée de Christophe Castaner à la tête du parti présidentiel qui avait ouvert la voie à ce «réaménagement» - terme privilégié par l'exécutif, pour souligner son caractère modeste. A l'arrivée, un mouvement sans surprise pour le nouveau patron de La République en marche (LREM) : celui-ci cède le porte-parolat du gouvernement à son collègue Benjamin Griveaux, mais conserve son secrétariat d'Etat aux Relations avec le Parlement.
La décision ne plaira pas à l'opposition, où l'on trouve discutable qu'un tel portefeuille soit confié au chef du parti majoritaire. Quant aux marcheurs, ils seront peut-être quelques-uns à juger que la direction de leur mouvement, sous sédation depuis les législatives, aurait mérité plus qu'un emploi à mi-temps. Fut-il bénévole, comme l'ont curieusement souligné l'intéressé et le député LREM Sylvain Maillard, sans envisager de remédier à cet obstacle. «S'il se sent capable de faire des journées de 48 heures, tant mieux» avait grincé, insensible à l'argument, la députée LREM Barbara Pompili.
Au diable, les mécontents : avec la bénédiction des deux têtes de l'exécutif, le Provençal conserve un strapontin au cœur de l'action. «Il sait très bien que s'il n'était plus au gouvernement, il sortirait de la photo, juge un ancien camarade socialiste. Comme Harlem Désir sous Hollande, il serait celui qui obéit aux ordres sans avoir voix au chapitre.» Loin des yeux, loin du cœur : inconcevable pour celui qui a revendiqué la «dimension amoureuse» de son rapport avec Emmanuel Macron. Voilà qui valait bien un bon vieux cumul : dès samedi, le secrétaire d'Etat enfilera donc ses habits de chef de parti. Direction Concarneau (Finistère), pour une rencontre avec des militants. Cela tombe bien, «je n'avais pas d'obligations ministérielles» ce jour-là, s'est réjoui mercredi l'ancien maire de Forcalquier.
Assez efficacement tenu par Castaner depuis mai, le porte-parolat échoit, lui, à Benjamin Griveaux (39 ans) - autre pionnier du macronisme, un temps pressenti pour la direction de LREM. Rattaché à Bercy, où il occupait l'ancien bureau d'Emmanuel Macron, le secrétaire d'Etat avait pris en main les dossiers industriels. Il s'était aussi investi, avec succès, dans la campagne de Paris pour obtenir le siège de l'Agence bancaire européenne, transféré depuis Londres. A lui, désormais, de répercuter la parole gouvernementale sur les plateaux et lors de l'habituel compte rendu du Conseil des ministres, chaque mercredi à l'Elysée. Comme François Baroin sous Chirac, et Laurent Wauquiez sous Sarkozy, Benjamin Griveaux sera porte-parole à plein-temps. Signe de l'importance de la fonction dans un gouvernement largement composé d'experts et de novices (voir ci-dessus), pas tous préparés à produire une défense tous azimuts de l'exécutif.