Menu
Libération

Andrea, 30 ans «Je ne crains pas la prison pour ma fille, mais la pression des gens et des médias»

par Mathilde Frénois, (à Nice)
publié le 4 janvier 2018 à 20h56

Depuis trois ans, Ivano Sovieri vit suspendu à ses messages. Devant son ordinateur, cet Azuréen de 58 ans tente de suivre, au fil des événements, le quotidien de sa fille Andrea partie, avec ses enfants en bas âge, faire le jihad en Syrie. «Même lorsque je n'avais plus de nouvelles, je ne les ai pas lâchés d'une semelle», dit ce grand-père. Alors quand Ivano Sovieri a reçu, la veille de Noël, un message annonçant leur possible retour en France, il s'est mis à sauter de joie sur sa chaise. Une joie de courte durée. Car la famille n'est toujours pas sur la route du retour. Pour l'aller, tout commence un mardi de septembre 2014. Les enfants de sa fille ne sont pas déposés à l'école. Andréa, 30 ans, convertie à l'islam, a quitté la Côte-d'Azur avec eux et huit membres de sa belle-famille pour la Syrie. Depuis, les enfants ont fêté leurs 7 et 9 ans «sous les bombes» et Andrea a accouché d'une fille, âgée aujourd'hui de 18 mois. «J'ai peur pour leur vie tous les jours depuis trois ans», raconte Ivano Sovieri. Après la réception du message, expédié par le mari de sa fille, il a contacté son avocat et la DCRI. «Je ne me suis pas senti abandonné par l'Etat, mais je n'ai pas été aidé non plus, estime-t-il. Mon gendre était connu pour ses relations avec Omar Omsen [recruteur niçois ndlr], on aurait pu les empêcher de partir.» Aujourd'hui, l'Azuréen préfère ne plus regarder vers le passé. «J'ai survécu à leur départ. Je n'appréhende plus rien, assure-t-il. Tout le reste, ce sera du bonus.» Il fait une pause. Et anticipe déjà un avenir : «Je ne crains pas la prison pour ma fille, mais la pression des gens et des médias : les trois-quarts de la France n'en veut pas. Comment les petits vont-ils se réinsérer ? Il faut qu'ils aillent sereinement à l'école.» En attendant leur retour en France et en classe, Ivano Sovieri raconte que l'un de ses petits-fils a fêté son anniversaire le jour de Noël. «Ce n'est rien du tout de rater un anniversaire. L'essentiel, c'est qu'on les fasse tous revenir.»