Menu
Libération
Social

Chez PSA, des accords sans accroc

Le constructeur automobile, qui affiche de bons résultats, souhaite 1 300 ruptures collectives. Hormis la CGT, les syndicats en acceptent le principe.
L'usine PSA de Sochaux, dans l'est de la France, le 6 mars 2014. (Photo Sebastien Bozon. AFP)
publié le 9 janvier 2018 à 20h46
(mis à jour le 9 janvier 2018 à 20h46)

La réunion de mardi matin entre la direction de PSA et les syndicats n'aura été qu'une formalité. Presque pas de discussions houleuses ni de rejet catégorique, mais plutôt une satisfaction affichée de part et d'autre à la sortie des négociations. «C'est même mieux que ce que l'on prévoyait», concède Brahim Aït Athmane, délégué syndical FO du site de Poissy.

Cadre légal

Les dirigeants y ont pourtant annoncé leur souhait de procéder à 1 300 ruptures conventionnelles collectives, auxquelles s'ajouteraient 900 congés senior. Soit 2 200 départs au total, alors que le groupe se porte bien et anticipe déjà un bilan prometteur sur l'exercice 2017, avec le succès de plusieurs modèles. Mais, en contrepartie, 1 300 personnes seront embauchées en CDI en 2018 (400 en production, 200 en R & D et 700 dans le réseau commercial), et 2 000 jeunes seront recrutés en alternance. Une satisfaction pour FO qui, avant la tenue de la réunion, exigeait jusqu'à 1 700 embauches pour soutenir notamment la production de la 3008. Avec le regret, néanmoins, que les embauches ne se fassent pas «d'un seul coup» , afin de «soulager certains sites».

De part et d'autre, on explique le succès des négociations par le fait que la rupture conventionnelle collective (RCC) vient intégrer un dispositif déjà existant au sein du groupe. «Il ne faut pas oublier que PSA a failli passer l'arme à gauche en 2012», rappelle un porte-parole du groupe. Un quasi-crash industriel qui, à l'époque, avait provoqué un électrochoc, conduisant à anticiper davantage l'évolution de certains métiers. «Nous allons de plus en plus vers la transition énergétique, la fin du diesel et le passage à l'électrique. Certains métiers changent, sont sujets à la robotisation, il faut être capable de s'adapter», justifie-t-on au sein de PSA. La direction et les syndicats parviennent en conséquence à signer un accord intégrant des plans de départ volontaires pour les salariés, appelé dispositif d'adéquation des emplois et des compétences (Daec).

Depuis 2013, grâce à ce dispositif, environ 2 000 employés quittent volontairement l'entreprise chaque année, dans des conditions jugées «avantageuses» par la plupart des syndicats. «C'est une mesure qui est populaire chez les salariés, ils y sont favorables. Ils voient cela d'un bon œil, par rapport à un départ contraint», analyse Christine Virassamy, déléguée syndicale CFDT. «Dans le cadre du Daec, un employé qui veut changer d'entreprise peut, par exemple, travailler pendant vingt-quatre mois dans une autre entreprise. S'il change d'avis, il revient à PSA, à son poste, ou à un poste similaire», poursuit-elle. PSA a annoncé mardi matin que les conditions de départ prévues par le Daec étaient reconduites en l'état, ce qu'exigeaient les syndicats avant la tenue de la réunion. Si rien ne change, donc, pour le salarié qui fait le vœu de partir, la RCC offre surtout un cadre légal à l'entreprise. «Il y a aussi un côté sensationnel, l'effet nouvelle loi», concède l'un des porte-parole du groupe.

«Précaires corvéables»

Seul syndicat majoritaire à s'être élevé contre le recours à la RCC : la CGT, qui y voit un moyen pour PSA de «contourner la procédure de licenciement économique». Déjà en 2012, le syndicat avait refusé de signer le Daec. «Le débat avec la CGT a été mouvementé», admet l'un des représentants syndicaux. Interrogé par France Info lundi matin, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, résumait ainsi la position du syndicat : «Avec les ruptures conventionnelles collectives, on peut faire ce que l'on veut, même lorsque le groupe se porte bien.» Il dénonce notamment une mesure qui augmenterait la flexibilité dans un groupe qui compte déjà beaucoup d'intérimaires : «Chez PSA, tous salariés confondus, on atteint 15 % de précarité, et dans des ateliers de production, on dépasse les 50 %. Donc, la volonté de la direction, c'est de transformer les CDI en précaires.» Un argument que l'un des porte-parole de PSA estime irrecevable : selon lui, les départs volontaires tels que présentés mardi par la direction ne concernent pas la production. La CGT, elle, persiste dans un communiqué : «C'est un boulevard pour certaines entreprises qui pourront se débarrasser à moindre coût de salariés ayant de l'ancienneté et donc considérés comme trop payés, et recruter, en même temps, des précaires corvéables et jetables.» Pour Denis Bréant, responsable du secteur automobile à la fédération CGT de la métallurgie, le syndicat doit se montrer intransigeant face à un groupe en bonne santé : «Nous sommes prêts à signer un accord dans la mesure où un départ est remplacé par une embauche.»

Les syndicats ont jusqu’à mercredi prochain pour signer, ou non, le texte proposé par la direction.