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Libération
Témoignage

«Des détenus plus jeunes, moins respectueux»

Catherine Forzi, secrétaire FO aux Baumettes
(Photo Patrick Gherdoussi)
par Stéphanie Harounyan, (à Marseille)
publié le 15 janvier 2018 à 20h36

Quelques pneus traînent encore devant l'entrée des Baumettes 2, le bâtiment tout neuf construit à côté du site historique de la prison marseillaise. Les gardiens ont levé le camp lundi en milieu de matinée, après l'annonce de la démission du directeur de Vendin-le-Vieil. A l'aube, ils étaient environ cinquante à bloquer l'entrée des agents. Catherine Forzi, la cinquantaine, surveillante et secrétaire locale de FO pénitentiaire, officie depuis quinze ans aux Baumettes, où elle a longtemps occupé un poste dans les coursives côté hommes. «Le fait d'être une femme m'évitait d'avoir des rapports de force avec les détenus,dit-elle. Aujourd'hui, ils sont plus jeunes et se foutent d'avoir une femme ou un homme devant eux. Ils sont moins respectueux.» Et les agents, eux, sont moins nombreux, donc moins disponibles. «On le voit dans la gestion des conflits au quotidien», souffle Catherine Forzi. Un quotidien rude, qui démarre à 6 h 45 pour l'équipe de jour. «D'abord, il faut procéder à l'appel dans chaque cellule», détaille-t-elle. La suite est un vaste rush autour des différents mouvements qui rythment les journées : parloirs, école, sport, douche, infirmerie… A 8 heures, il faut organiser la promenade, ouvrir les cellules, contenir le mouvement, puis encadrer la remontée à 11 heures, pour le repas. L'équipe du matin doit tenir jusqu'à 12 h 45 avant la relève.

A chaque étape, l'agent doit rester sur ses gardes. «Les tensions peuvent arriver n'importe quand, souligne Catherine Forzi. Cela peut être un détenu qui a appris une mauvaise nouvelle et veut tout casser…» Aux Baumettes, avec 60 à 120 prisonniers par agent à gérer selon les sections, les surveillants comblent les brèches comme ils peuvent. Si la livraison d'un bâtiment a amélioré les conditions matérielles, les moyens humains s'effritent face à une population carcérale qui ne cesse d'augmenter. Difficile, du coup, de jouer leur rôle de vigie concernant les radicalisés. La secrétaire FO le rappelle : «Ça fait vingt ans qu'on alerte sur ce problème et qu'on n'est pas entendus.»