Promis, la future loi Le Maire «ne sera pas une loi Macron 2». «Les lois attrape-tout, ce n'est pas notre tasse de thé et ce n'est pas le souhait du président de la République», assure-t-on à l'étage du ministre de l'Economie et des Finances, qui a présenté lundi ses vœux à Bercy devant un parterre de chefs d'entreprise, d'élus et de journalistes. Entamant sa deuxième phase, ce projet de loi, baptisé «plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises» (dit «Pacte»), sera la «priorité» de Le Maire pour 2018. Mais de ce texte, a insisté le ministre, «il ne faut en garder que l'essentiel : faire grandir nos entreprises et faire participer les salariés.»
Du travail de six binômes associant députés de la majorité et chefs d'entreprise, Bercy a retenu 31 propositions mises en ligne sur un site dédié. «Je vous invite à commenter […] à les améliorer, à les compléter et à voter pour celles qui vous semblent les plus pertinentes», a lancé Le Maire, rappelant que le projet est prévu au menu du conseil des ministres en avril. Avec une première certitude : sauf arbitrage contraire pris par Matignon ou l'Elysée, la question du Smic ne sera pas traitée dans ce texte. Dans son rapport annuel, le groupe d'experts sur le salaire minimum, dirigé par l'économiste Gilbert Cette, proposait début décembre de désindexer le Smic de l'un des deux - voire des deux - critères de revalorisation (inflation et pouvoir d'achat du salaire ouvrier). «Il est très compliqué de dire qu'il faut que le travail paie et, dans le même temps, revoir l'indexation du Smic», justifie-t-on à Bercy, où l'on met en garde sur «l'impact non négligeable pour 11 millions de personnes». Pour autant, si la question du Smic ne devrait pas être abordée dans ce projet de loi, le gouvernement ne «ferme pas complètement la porte» pour le reste du quinquennat, précise-t-on chez Le Maire.
Intéressement : objectif «100% des salariés couverts»
Dans ces 31 propositions promises à consultation publique, le ministre de l'Economie propose à la fois des mesures pour «faciliter la création d'entreprise» (assouplissement des obligations, 100% des démarches administratives en ligne en 30 minutes…) et pour aider au «financement» des plus petites. «Nos entreprises ne sont pas armées pour faire face à la mondialisation», martèle-t-on à Bercy. Pour y remédier, les services de Le Maire veulent par exemple «orienter davantage l'assurance-vie vers les placements longs et productifs», «simplifier l'accès des PME aux marchés boursiers» ou encore la création d'un «plan d'épargne en actions pour les jeunes». «Tous les outils pour y parvenir seront mis sur la table: les seuils sociaux et fiscaux, la simplification des règles, les nouvelles modalités de financement, les règles de la transmission», a insisté Le Maire dans ses vœux, glissant au passage que ce projet de loi autorisera les «cessions d'actifs» et les «privatisations» pour financer un «fond de l'innovation pour la rupture», promis par Emmanuel Macron, et doté au départ de 10 milliards d'euros.
Mesures pro-entrepreneurs d'un côté, mais aussi propositions en faveur de la participation des salariés pour «mieux [les] associer aux résultats» de leur boîte, le texte se veut équilibré. Dans l'attente des conclusions, d'ici deux mois, de la mission confiée à l'ex-patronne de la CFDT, Nicole Notat, et au président du groupe Michelin, Jean-Dominique Senard, Le Maire propose de «réfléchir à la création d'un statut d'entreprise à mission» (avec d'autres objectifs que la seule rémunération des actionnaires), de «mettre en place des fondations actionnaires» (entreprises détenues par des fondations), et de «renforcer l'égalité femmes-hommes dans la gouvernance et les fonctions de direction des entreprises». Avec également un objectif important de «100% des salariés […] couverts par un accord d'intéressement et de participation». En échange, le gouvernement envisage de revoir le forfait social payé par les employeurs.
Le ministre de l'Economie semble cependant frileux sur une présence élargie des salariés dans les conseils d'administration, sujet d'une proposition de loi socialiste au menu des députés ce jeudi : Sa «position n'est pas arrêtée», dit-on à Bercy, qui interroge : «Est-ce qu'il faut baisser le seuil? Nous sommes réservés. Faut-il que le champ d'application soit plus vaste? Ça fera partie des discussions.» Autant dire qu'avant la présentation du projet de loi en conseil des ministres, le texte a encore le temps de (beaucoup) changer.