Mercredi matin, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), c’est la galette des rois chez EE-LV. Le chef des Verts, David Cormand, a l’air de bonne humeur. Il le sait. La décision est attendue d’une minute à l’autre. Le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes fera bientôt partie du passé. Un combat important et de longue date. Les écolos sont en première ligne depuis des années sur ce dossier. Pour autant, David Cormand ne montre pas les muscles. Le problème de l’évacuation de la ZAD n’est pas réglé. La peur de la bavure ou de l’accident est présente dans les esprits. La mort de Rémi Fraisse, à Sivens (Tarn) en 2014, est là pour le rappeler. David Cormand ne pourra pas filer ses conseils à Emmanuel Macron afin que l’évacuation se déroule dans le calme : la comète EE-LV est trop petite, trop éloignée de l’Elysée. Du coup, les écolos empruntent d’autres chemins pour atteindre les oreilles du chef de l’Etat.
Si les Verts sont réputés pour leurs bagarres d’ego, si EE-LV a éclaté lors du précédent quinquennat, les écolos savent encore se parler et sont capables d’infléchir certaines décisions, grâce à des hommes bien placés. Et pas des moindres. Le ministre de l’Ecologie, Nicolas Hulot, le député Matthieu Orphelin, le président de l’Assemblée nationale, François de Rugy, et Daniel Cohn-Bendit qui a la ligne directe de l’Elysée, en sont. Et si les écolos aiment se disputer, même violemment, ils savent aussi se tenir la main pour mener des combats. L’abandon de NDDL l’illustre.
L'eurodéputé Pascal Durand reste proche d'EE-LV et de Nicolas Hulot. Il le dit sans détour : «Dany, Nicolas et Matthieu ont joué un rôle très important.» Comme d'autres écolos, il discute souvent avec eux sur «différents dossiers».Une manière indirecte d'accéder à l'Elysée.Selon lui, la vraie victoire remonte au printemps dernier, lors des premiers échanges entre quelques têtes d'affiches écolos et Emmanuel Macron, qui était à la recherche de verdure pour élargir son électorat.
«Il n'a jamais dit aux Verts qu'il allait abandonner Notre-Dame-des-Landes, mais il s'est engagé à discuter et à étudier une alternative, d'ailleurs, c'était une des conditions de Nicolas Hulot pour intégrer le gouvernement», souffle Pascal Durand. Au fil des discussions, un autre nom revient. Celui de Pascal Canfin, ancien ministre sous Hollande, aujourd'hui directeur général de la branche française de l'ONG de défense de l'environnement WWF. Il fait, lui aussi, le lien entre Macron et la mouvance écolo.
Contacté par Libération, il admet à demi-mot. «Des gens vous disent que j'ai discuté à plusieurs reprises avec Macron sur le sujet ? Je ne confirme pas mais je peux laisser dire», affirme-t-il. Pascal Canfin salue «la cohérence» du gouvernement. Puis, un mot sur l'évacuation de la ZAD : «Il faut éviter toutes les précipitations, laisser le temps et organiser un retour à la normale progressif pour ne pas tout gâcher dans les jours qui arrivent.» Le prochain combat des écolos.