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Luttes

Prisons : les syndicats divisés face aux nouvelles propositions de Nicole Belloubet

La garde des Sceaux a proposé des primes plus élevées ou encore des «quartiers totalement étanches» pour les détenus radicalisés. Des «avancées» pour l’Ufap, mais inacceptables pour FO et la CGT, qui dénonce la consultation en ordre dispersé des syndicats.
Devant la prison de Vendin-le-Vieil, le 16 janvier. (Photo François Lo Presti. AFP)
publié le 25 janvier 2018 à 18h38
(mis à jour le 25 janvier 2018 à 18h47)

Au terme du onzième jour de mobilisation des surveillants pénitentiaires, leurs principaux syndicats étaient plus divisés que jamais ce jeudi soir, après avoir été consultés par la ministre de la Justice, qui leur a présenté de nouvelles propositions. Lesquelles consistent notamment en 1 500 places aménagées «dans des quartiers totalement étanches» pour les «détenus terroristes islamistes et radicalisés» ; «1 100 emplois supplémentaires de surveillants sur quatre années» ; des primes augmentées pour atteindre plus de 30 millions d'euros au total…

Pour l'Ufap-Unsa, syndicat majoritaire de la profession (40%), voilà qui constitue bel et bien des «avancées». Seront-elles suffisantes ? Jean-François Forget, le secrétaire national du syndicat, a expliqué que l'organisation se donnait jusqu'à vendredi midi pour donner une réponse, après consultation des militants. Reçue juste après, FO Pénitentiaire (30%) s'est montrée bien moins enthousiaste. Son secrétaire général, Emmanuel Baudin, a jugé les propositions «loin, loin de ce que réclamait la base» et a anticipé le risque d'un «week-end très, très, très tendu en prison en France». En fin d'après-midi, le syndicat a annoncé qu'il ne signerait pas ce nouveau projet d'accord.

Un recours déposé par un détenu

Dernière à être consultée, la CGT Pénitentiaire (15%) a elle aussi opposé un «non» catégorique. D'abord pour protester contre la manière dont ont été organisées les consultations : à ses yeux, le fait que les syndicats aient été reçus en ordre dispersé, avec l'Ufap pour commencer, relève d'une «méthode ahurissante qui pue la magouille». Ensuite parce que, explique-t-elle, ses personnels en lutte consultés via Internet ont «à une très large majorité» refusé les propositions de la ministre. «Ils estiment que l'essentiel n'y est pas, soit la traduction de la reconnaissance des missions de service public des personnels de surveillance dans le statut.»

L'avenir du mouvement est donc plus incertain que jamais ce jeudi soir, et ce alors que la situation se tend derrière les murs. Car en attendant, les détenus trinquent. «Dans un contexte où les tensions s'accroissent dans des établissements surpeuplés, ces actions – inédites dans la plupart des prisons bloquées – ne peuvent qu'augmenter la souffrance intra-muros», avait prévenu l'Observatoire international des prisons (lire notre article). Depuis, on a appris qu'un détenu du centre de Moulins-Yzeure (Allier) a déposé un recours en référé-liberté au tribunal administratif de Clermont-Ferrand pour dénoncer les conséquences des blocages sur les conditions de détention. «Depuis neuf jours», il n'a pu prendre «aucune douche», «n'a pas eu droit à des promenades» et les poubelles de sa cellule ne sont pas collectées, a-t-il dénoncé.

Ce jeudi, 116 des 188 prisons françaises demeuraient touchées par le mouvement. Dans l’après-midi, les gardiens de 42 établissements refusaient encore, en totalité ou en partie, de prendre leur service (contre 72 le matin), selon la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP).