C'est curieusement grâce au Conseil d'Etat que Caroline Collomb vient de valider son entrée sur la scène politique nationale. Juge au tribunal administratif de Toulon, nommée à Paris tandis que son mari s'installait Place Beauvau, elle est devenue cet automne la référente d'En marche dans le Rhône. Une situation propice au «conflit d'intérêts», selon l'ancien élu LR de la périphérie lyonnaise Eric Forquin, qui a saisi l'institution afin d'«attirer l'attention» sur une «mutation de complaisance», un «véritable passe-droit». Pas à en croire l'avis rendu le 7 février : «Si un magistrat administratif peut assumer une fonction de responsabilité au sein d'un parti politique, c'est à la double condition que les obligations inhérentes à cette responsabilité n'affectent pas sa disponibilité pour l'exercice de ses fonctions juridictionnelles et qu'il ne soit pas, du fait de cette fonction, amené à s'exprimer d'une façon qui ne serait pas compatible avec son obligation de réserve.»
Macroniste de la première heure, devenue proche du couple présidentiel, Caroline Collomb, quadra, tout comme le locataire de l'Elysée, va pouvoir poursuivre son ascension express au sein du parti. Une fulgurance rarement commentée avec franchise par les marcheurs lyonnais, noyautés par son ministre de mari. «J'en prends acte, c'est ainsi. Je suis assez féministe, et dans un couple, chacun est une personne, a son parcours», plaide Anne Brugnera, députée LREM du Rhône et ancienne adjointe de Collomb. Encartée au PS à 18 ans, Caroline Collomb devient secrétaire de section à Lyon de 2014 à 2017 et s'affilie aux Poissons roses, une mouvance chrétienne à la marge du parti. Alors étudiante en histoire, elle rencontre Gérard Collomb en 1996. Il la fait rire, ils se marient quatre ans plus tard. Elle sympathise avec Najat Vallaud-Belkacem sur les bancs de Sciences-Po, mais les copines finiront par se brouiller. «Najat a grandi. [Caroline], elle, est restée la femme du maire de Lyon, elle veut s'affirmer à tout prix, or elle n'a pas fait ses classes», commente l'ex-président PS de la région Rhône-Alpes Jean-Jack Queyranne. «Je ne dis pas qu'elle ne peut pas organiser des choses, mais elle n'a aucune existence politique propre, si ce n'est un certain talent pour l'intrigue», assène un cadre PS lyonnais. «Dans le Rhône, sur une population d'1,7 million d'habitants, il n'y avait pas moyen de trouver quelqu'un d'autre qui aurait fait l'affaire pour représenter LREM ?» ironise le chef de file LR du département, Philippe Cochet.
Le Conseil d'Etat a néanmoins précisé que la cohabitation de responsabilités politiques «avec les attributions ministérielles, particulièrement sensibles, de l'époux de Mme Collomb implique de la part de celle-ci un surcroît de vigilance et de discrétion». Au lendemain de la victoire de Collomb à Lyon en 2001, Caroline, alors jeune mariée, disait à Lyon People : «La femme de César doit être irréprochable.» Surtout si elle marche pour Jupiter.