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Libération
Décryptage

Assurance chômage : un accord ou rien

publié le 23 février 2018 à 20h46

Fumée blanche sur l'assurance chômage. Après des semaines de négociation, les partenaires sociaux sont parvenus à un accord, jeudi en fin de journée. Enfin presque : la plupart des confédérations syndicales susceptibles de signer, comme la CFDT et FO, ont conditionné leur paraphe au respect de leur texte par le gouvernement. Une situation assez rare, qui en dit long sur la méfiance réciproque qui s'est installée entre l'exécutif et les partenaires sociaux. Il faut dire que quelques heures plus tôt, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, avait rabroué l'accord trouvé entre syndicats et patronat sur la formation professionnelle. Sur CNews, elle avait ainsi dénoncé la «complexité» du texte, estimant que «pour que cela marche, il ne faut pas simplement créer le droit. Il faut le rendre effectif. […] Il faut que ce soit plus simple». «On ne pourra être signataire du texte [sur l'assurance chômage] que si l'Etat s'engage à en respecter tous ses termes, a réagi la négociatrice de la CFDT, Véronique Descacq. Le gouvernement ne peut pas mépriser la démocratie sociale comme il le fait.» Une passe d'armes qui illustre toute l'ambiguïté de la démarche d'Emmanuel Macron : demander aux partenaires sociaux de se mettre d'accord, avec le risque qu'ils s'éloignent de ses engagements de campagne. Retour sur les principaux points de l'accord trouvé jeudi.

Limitation des contrats courts

C'était le principal point de blocage : l'acceptation, par le patronat, d'un mécanisme permettant de limiter le recours aux CDD par les employeurs. Dans sa feuille de route, le gouvernement avait menacé, en cas d'échec de la négociation sur ce point, d'imposer un système de «bonus-malus» aux entreprises sur leurs cotisations d'assurance chômage. Après avoir freiné des quatre fers, le patronat a fini par accepter l'ouverture de négociations, dans chaque branche professionnelle, devant aboutir à des «mesures permettant de modérer le recours aux contrats courts et d'allonger les durées d'emploi», ainsi qu'à des «mesures relatives à l'organisation du travail et à la gestion de l'emploi». Avec, «lorsque cela est possible», la fixation d'«objectifs quantitatifs et qualitatifs» contrôlés par un «groupe de suivi paritaire». Date butoir pour la fin de ces négociations de branche : fin 2018.

Nouveaux droits pour les démissionnaires

Le candidat Macron avait présenté comme un élément de sécurisation des salariés face à la libéralisation du droit du travail l'ouverture de l'assurance chômage aux démissionnaires. Ou plutôt la création d'une nouvelle possibilité d'indemnisation pour ce public, puisque quinze cas de démissions, qui concernent quelque 70 000 personnes chaque année, permettent déjà de bénéficier des allocations chômage. Or ce seizième cas négocié par les partenaires sociaux est finalement assez restreint, et ne toucherait que 14 000 à 23 000 personnes en plus par an, pour un coût estimé entre 180 et 330 millions. Soucieux de préserver les finances du système, dont ils sont gestionnaires, syndicats et patronat ont en effet imposé de sérieuses conditions : justifier de sept ans d'ancienneté dans l'emploi mais surtout pouvoir présenter un «projet de reconversion professionnelle» nécessitant une formation qualifiante ou une formation complémentaire. Un projet qui, par ailleurs, devra répondre «aux besoins du marché du travail» et qui devra être validé, avant la démission, par une «commission paritaire régionale».

Gouvernance

Dernier point sensible : la gestion de l'assurance chômage, aujourd'hui régie par le patronat et les syndicats au sein de l'Unedic. Pas question, selon leur accord, de laisser le gouvernement s'inviter comme il en avait l'intention. Leur texte propose ainsi que la négociation paritaire continue de «définir en toute autonomie les règles d'indemnisation et le niveau de ressources nécessaires» du régime. Avec comme perspective de se passer, à terme, de «la garantie financière accordée par l'Etat». Une façon de claquer la porte au nez de Macron, ce qui ne devrait pas vraiment réchauffer leurs relations.