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Libération
EDITORIAL

Mauvaise foi

publié le 13 mars 2018 à 20h16

La situation des clients de la SNCF est «insupportable», a dit Nicolas Hulot pour justifier la réforme de la compagnie. Ce qui est difficilement supportable, c’est sa mauvaise foi.

La SNCF ne marche pas plus mal que la Deutsche Bahn réformée, les retards qu’elle affiche ne sont pas supérieurs à la norme du secteur. En Grande-Bretagne, la privatisation des lignes est loin d’être un succès ; le Parti travailliste réclame la renationalisation des chemins de fer, approuvé sur ce point par 80 % de l’opinion britannique. Un signe, au pays du libéralisme thatchérien… Faut-il rappeler que la SNCF gagne de l’argent, que son réseau TGV est l’un des meilleurs du monde, que le prix de ses billets se situe dans la fourchette basse des prix européens ? Quant aux «privilèges» des cheminots, outre qu’ils ont été rabotés au fil du temps, ils s’appliquent le plus souvent à des salariés qui gagnent autour de 2 000 euros par mois et qui acceptent en contrepartie des servitudes d’horaire ou de pénibilité suffisamment contraignantes pour rendre aujourd’hui le recrutement difficile.

Hulot veut camoufler en fait l’option très idéologique prise par le gouvernement Philippe. Cette manie de tout privatiser, individualiser, libéraliser, finit par indisposer beaucoup de gens. Négocier certains avantages, améliorer le réseau, le service, la compétitivité ? C’est en cours depuis dix ans. Rien de patent n’oblige à un big-bang, sinon le dogme libéral dont les classes dirigeantes se sont faites les apôtres mécaniques. Celui-ci porte en revanche des conséquences politiques funestes. En France, le train est un instrument de la République, c’est-à-dire de la solidarité, de l’égalité, de la cohésion sociale et territoriale. En sonnant le tocsin avec une cloche fêlée, le gouvernement veut en fait s’y attaquer. Nous risquons un conflit majeur. Grâce à En Marche, nous irons à pied…