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Soupes

Prendre l'ascenseur pour récolter ses légumes

Fondateur de Peas & Love, Jean-Patrick Scheepers vient au Mipim de Cannes pour vendre ses potagers de toit aux promoteurs.
Des fruits et légumes à Paris en octobre 2016. Photo Miguel Medina/AFP (Photo Miguel Medina/AFP)
publié le 15 mars 2018 à 11h00

En matière d'agriculture dans les villes, il existe deux modèles. «Dans les pays les moins développés, l'agriculture urbaine a pour but de nourrir les gens. Dans les pays développés,elle sert à reconnecter le citadin à la nature.» Cette minute de sociologie est dûe à Jean-Patrick Scheepers, inventeur des fermes urbaines Peas & Love (Pois & Amour en français, quoiqu'on on perde le jeu de mots...).

Certes, l’homme n’a pas «inventé» le fait de planter des tomates dans un bac mais il a mis au point un dispositif qui peut être reproduit à l’infini sur les toits des immeubles, dès lors que ces derniers sont plats.

Comment ça marche? Sur 600 à 1000 mètres carrés de toiture, on pose des bacs en grillage. Leur alignement représente 300 parcelles, c'est-à dire 300 fois 3 mètres carrés. Cela ne semble pas lourd mais avec 3 mètres carrés, «on peut cultiver 71 plantes», s'enthousiasme Scheepers. En rotation sur toute l'année mais quand même...

Qui récolte? Les riverains. Recrutés via les réseaux sociaux dans un rayon d'un kilomètre. Ils paient 38 euros de location par mois. Et qui entretient? Peas & Love. Le savant calculs de la superficie nécessaire aux cultures ramenée aux revenus des loyers acquittés par les utilisateurs permet de financer un équivalent temps plein. Ce «community farmer» ne se contente pas de biner et repiquer, il anime aussi sa communauté avec des actions pédagogiques. Jean-Patrick Sheepers, qui a monté des cours de cuisine précédemment, s'est aperçu qu'il fallait accompagner les gens quand il a entendu quelqu'un parler de manger les feuilles de fraisiers.

Quelle différence avec les jardins partagés? Le modèle économique. «Les jardins partagés, tenus par les associations, sont un laboratoire urbain très intéressant et c'est pour cela qu'il faut les aider. Mais ce n'est pas un modèle de business». Or, si Jean-Patrick Scheepers vient au marché international de l'investissement immobilier, c'est parce que ses premiers clients sont les promoteurs. Ce sont eux qui lui donnent la clé du toit. A Paris par exemple, le verdissement des toitures de bâtiments neufs est une obligation du plan climat. D'où l'intérêt pour les constructeurs d'un système standard qui fonctionne sans qu'ils aient à s'en occuper.

Il existe l'un de ces potagers à Bruxelles, et depuis 2017, un autre à Paris, sur les 900 mètres carrés de toiture de l’hôtel Yooma à Beaugrenelle. Qu’est-ce qu’on plante? Presque tout sauf des pommes de terre. Herbes aromatiques, salades, tomates, fraises, concombres, piments, aubergines, courgettes, radis, navets, betteraves... Au Yooma, le restaurant de l’hôtel se sert là. Et les récolteurs empruntent un ascenseur dédié, de sorte que les paniers de légumes ne croisent pas les valises à roulettes.