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Libération
édito

Erreur d’aiguillage

Emmanuel Macron en gare du Creusot. (Photo Hamilton. Réa)
publié le 2 avril 2018 à 20h26

Quand on veut noyer son cheminot, on dit qu’il coûte trop cher. De toute évidence, le gouvernement Philippe a noirci volontairement le tableau ferroviaire. Non, la SNCF, n’est pas cette société au bord du gouffre qu’on décrit dans les déclarations ministérielles. Elle gagne de l’argent, elle remplit ses devoirs de service public, elle suscite une satisfaction plutôt majoritaire dans le public. Comparée à d’autres sociétés européennes, elle ne fait en rien figure de lanterne rouge. Elle doit se préparer à la concurrence ? A coup sûr, ce qui demande efforts, recherche d’une meilleure productivité et d’un meilleur service. Le rapport Spinetta, nettement plus nuancé que les simplifications gouvernementales, ne dit pas autre chose. Et l’on peut parier que les cheminots en sont conscients, si l’on met à part une minorité de partisans du statu quo. Résolu à une opération à la hussarde, avec coups de clairon et coups de menton, le gouvernement a voulu jouer l’opinion contre les «privilèges» cheminots, qui sont souvent des avantages accordés en échange d’horaires pénibles et de conditions de travail éprouvantes. Du coup, il a fait l’unité des syndicats contre lui et braqué une grande partie des cadres qui admettent mal d’être montrés du doigt devant la France entière. A l’automne, Emmanuel Macron avait remporté haut la main la bataille du code du travail. Il veut rééditer l’exploit au printemps. Pas si simple…

Il était, selon toutes probabilités, possible de réformer la SNCF sans passer par l’épreuve de force générale. Pour stigmatiser les tortillards de la réforme, comprenez les gouvernements précédents, on a choisi le changement TGV. L’avenir dira si c’est une erreur d’aiguillage. En attendant, la France se prépare aux joies de la marche à pied et du covoiturage. En espérant que cet exercice ne présage pas d’un déraillement.