Gilles Roussel dirige la faculté Paris-Est-Marne-la-Vallée. Il a été élu à la tête de la Conférence des présidents d’université (CPU) fin 2016.
Comment avez-vous anticipé la plateforme Parcoursup ?
Le timing est extrêmement serré. On découvre Parcoursup (lire ci-contre) au fur et à mesure. La question est : voulait-on garder le système précédent ? Nous, on demandait qu'il change. Dans mon établissement, nous avons organisé des réunions avec les différents acteurs pour essayer de trouver des positions de consensus. On a fait au mieux en très peu de temps. Il y a aussi eu des conseils de formation universitaire au ministère. On a été accompagnés. En ce moment, on est dans la phase du tri des dossiers, il y a des facs et filières où on va devoir les classer, mais quand il n'y aura pas de pression sur une formation, tous les étudiants seront pris. Une autre interrogation est de savoir ce qui va se passer en septembre : est-ce que les efforts sur les places supplémentaires vont répondre aux attentes des jeunes ? Au-delà de l'université, est-ce que les jeunes des bacs professionnels - dont le nombre est en augmentation - qui veulent poursuivre dans le supérieur auront une place ? Ce ne sera pas à l'université de répondre, mais aux BTS et aux classes prépa, qui ont des modes de sélection bien établis.
Certains enseignants d’universités refusent de participer au tri des dossiers. Qu’en dites-vous ?
Dans ma fac, un certain nombre d'enseignants ne veulent pas faire de classement. Je respecte leur point de vue. Mais ne pas classer, c'est un retour à ce qu'on ne voulait pas faire, le tirage au sort. Le Snesup [Syndicat national de l'enseignement supérieur, ndlr] a proposé qu'on fasse un classement par ordre alphabétique. Comment va-t-on expliquer aux jeunes qui arrivent à l'université qu'on les a classés par ordre alphabétique ou qu'on les a tirés au sort ?
L’autre point, c’est qu’on ne peut pas accepter tout le monde partout, il y a des tailles d’amphi, une capacité d’accueil… Il y a nécessairement une répartition des élèves. Et pour cela, il est plus acceptable qu’un jury de personnes qui sont des enseignants, sensibles à des questions d’égalité des chances et d’ascenseur social, tranche, plutôt que de pratiquer un tirage au sort.
Des étudiants et lycéens craignent que Parcoursup n’aboutisse à un «classement social» et à un nivellement des universités.
Qui mieux que les responsables de formation peuvent s’assurer que cette ségrégation sociale ne soit pas mise en place ? Dans les universités, c’est quand même notre vocation depuis longtemps, ce sont des choses auxquelles on croit. «L’université de niveau» ne m’inquiète pas. La plupart des choix sont déjà faits pour des raisons de proximité territoriale, et l’échappatoire ce sont les prépas ou les filières sélectives. D’autre part, il y a des universités qui pratiquent déjà une forme de tri, depuis des années, à travers leurs filières spécifiques.