Il est 1 h 45 mercredi, rue Princesse, dans le VIe arrondissement de Paris. Une voiture de police et une autre de la BAC bloquent le passage. Une dizaine de policiers, en civil et en uniforme, s'agitent autour d'un homme en état d'ivresse. Rien d'inhabituel «rue de la soif», où chaque soir apporte son lot de fêtards. Sauf que cet homme, ancien sénateur, a fait partie du gouvernement Valls. Il s'appelle Jean-Vincent Placé et, à lui tout seul, il vient de retourner un bar comme une équipe de rugby.
Quelques minutes plus tôt, surexcité, Placé est entré dans l'un des établissements de la rue pour boire un coup. «Il s'est pointé comme un roi, avec un melon pas possible, sans dire bonjour ni merci ni merde», nous a raconté quelques minutes après les faits un membre de l'équipe. Jean-Vincent Placé se serait accoudé au zinc, faisant signe au barman de le servir, d'un air suffisant, selon notre témoin : «Il a fait un vague geste de la main et a juste dit "à boire".» Puis il se serait dirigé vers la piste de danse où se trouvaient deux jeunes femmes. «Il leur a dit : "Dansez pour moi et je vous paie", explique le témoin. Il a continué à faire chier tout le monde, on a dû appeler le videur.»
Le videur en question approche les 2 mètres et dépasse largement les 100 kilos. Placé lui aurait dit : «Tu veux que je te mette un coup de boule ?» «On lui a dit que ce n'était pas parce qu'il était un homme politique qu'il pouvait tout se permettre», précise le témoin.
Jean-Vincent Placé joue de malchance. Dans le bar se trouve un commissaire divisionnaire. Il appelle ses collègues qui débarquent en trombe. Placé est exfiltré du bar et encerclé par des agents. Les quelques noctambules alcoolisés de la rue s'agglutinent autour de l'attraction du moment. D'abord, l'ex-sénateur explique aux policiers qu'ils ne savent pas faire leur boulot. Puis leur crie : «Vous servez à rien !» Aucun témoin n'a évoqué auprès de nous des propos racistes, comme le relayaient jeudi plusieurs médias. L'ancien ministre vient de gagner un ticket pour la cellule de dégrisement. Il repart à l'arrière de la voiture de la BAC. Il est 2 h 30. Une plainte pour «outrage» aurait été déposée par un policier. Le videur et l'une des deux femmes importunées pourraient aussi porter plainte. Jeudi soir, la garde à vue de Jean-Vincent Placé a été prolongée, selon France Info.