Ce devait être un «momentum national», dixit un ministre, c'est un démarrage en sourdine. Ce samedi, La République en marche lance sa «grande marche européenne» censée, comme l'avait été la vaste opération de porte-à-porte nationale initiée par un Emmanuel Macron pas encore candidat à la présidentielle, réveiller l'intérêt citoyen pour l'avenir de l'UE dans la perspective du scrutin de 2019.
Plombé par son report, du fait de l’attentat dans l’Aude, l’événement qui devait marquer le «top départ» de la campagne du parti macronien a perdu de son lustre, reconnaît un membre de la direction. Prévue pour durer six semaines, la grande marche s’achèvera le 9 mai. Quatre semaines, dont trois pendant les vacances scolaires… Initialement mobilisés, plusieurs piliers du gouvernement, dont le Premier ministre, ont cette fois argué de l’impossibilité de bloquer un second week-end pour faire les cages d’escalier.
Une dizaine de ministres restent cependant sur le pont, dont Benjamin Griveaux et Mounir Mahjoubi, les deux élus parisiens ne voulant pas perdre l’occasion de cranter l’élection suivante, la municipale de 2020.
Christophe Castaner lui-même a réduit son ambition. Alors qu'il projetait de commencer sa marche dans une bourgade du Grand Est, le délégué général de LREM et ministre devrait se contenter d'un petit saut à Tours. «C'est moins intéressant symboliquement. Mais il ne pouvait pas prendre le risque d'être bloqué par les grèves SNCF», explique un de ses proches. «Cela pourrait être plus difficile de focaliser l'attention des gens sur l'Europe dans le contexte actuel de conflit social», ajoute Philippe Zaouati, le référent parisien de LREM. Sans compter que si le lien était fait, l'aimable questionnement citoyen pourrait tourner à la prise de bec, l'ouverture du rail à la concurrence réclamé par l'Europe ayant tout à voir avec la volonté de l'exécutif de modifier le statut de la SNCF…
Pas de quoi, pourtant, doucher l'enthousiasme des militants, à en croire les cadres du parti macronien. «Beaucoup de ceux qui nous ont rejoints pendant la présidentielle étaient orphelins d'un engagement européen sans timidité, indique le député LREM Pieyre-Alexandre Anglade. Les marcheurs ont aujourd'hui une envie très forte de retourner sur le terrain, d'être utiles.»
LREM tente de réajuster le tir : en termes de com, le vrai départ de l'opération aura lieu avec Emmanuel Macron au Parlement de Strasbourg, le 17 avril, jour du lancement dans les 27 pays de l'UE des «consultations citoyennes». Dans cette affaire, le Président, dont la vision est tout entière déterminée par la relance du projet européen, joue gros. «Vu la poussée des partis populistes, europhobes, et extrémistes, le résultat du scrutin européen peut être désastreux», admet un ministre. L'enjeu n'est pas moins fort pour LREM, dont l'ancrage local n'est pas assuré. «Si on perd les européennes, marqueur clé pour nous, on perdra les municipales», prévient un fidèle du chef de l'Etat.