A Stocamine, la possibilité d'un déstockage des polluants toxiques enfouis sous la plus grande nappe phréatique d'Europe réapparaît. Un an après l'arrêté préfectoral autorisant le confinement pour l'éternité de 44 000 tonnes de déchets industriels, l'Etat entrouvre finalement une autre porte. Le ministère de la Transition écologique vient en effet de commander une étude sur la faisabilité d'un déstockage total, scénario réclamé depuis la fermeture du site en 2002 par les collectivités territoriales, habitants, élus, associations et syndicats. Alors que les essais de bouchons en béton ont débuté dans ce cimetière chimique, le sort de l'ancienne mine de potasse de Wittelsheim (Haut-Rhin) n'est peut-être pas scellé. Nicolas Hulot serait désormais «conscient que toutes les études n'ont pas été à ce jour entièrement menées à leur terme pour permettre une décision définitive éclairée», explique la préfecture du haut Rhin dans un communiqué.
«La solution logique était qu'on enlève tout pour protéger la nappe. Mais aucune étude sérieuse n'a été faite. Intellectuellement, c'était une aberration», remarque Bruno Fuchs, député LREM du Haut-Rhin, pour qui cette remise à plat pourrait augurer d'une suite à la Notre-Dame-des-Landes.
Site unique en France, Stocamine a ouvert en 1999. A l’origine, le projet était pensé comme une solution de reconversion pour le bassin minier alors que le filon de potasse s’épuisait. Sous la mine Joseph-Else, 100 km de galeries sont creusées dans le sel gemme. Un stock dimensionné pour accueillir en trente ans 320 000 tonnes de déchets industriels ultimes, contenant amiante, cyanure, mercure, arsenic, chrome… L’idée n’emballe pas la population, qui finit par s’y ranger avec l’introduction de la notion de réversibilité en cas de problème. Mais trois ans plus tard, un incendie ravage le bloc 15. L’activité de stockage, jamais rentable, ne reprendra pas. L’entreprise publique Mines de potasse d’Alsace (MDPA) est placée en liquidation. Depuis, on s’écharpe sur ce dossier à coup d’expertises et de consultations pour statuer sur le devenir des déchets. Le temps passe et compromet le déstockage. La mine s’effondre et la notion de réversibilité s’estompe. Et la remontée de l’eau chargée de polluants menace, à terme, la nappe phréatique.
En 2011 un comité de pilotage rend un avis favorable à l'enfouissement définitif, jugeant le déstockage trop long, coûteux et risqué. L'arrêté préfectoral sort en mars 2017. Le confinement est prévu pour s'achever en 2024, selon le calendrier prévisionnel. Jusqu'à mardi : «Le ministre de la Transition écologique a décidé que l'année 2018 soit mise à profit pour […] expertiser le délai de quinze ans mis en avant par les Mines de potasse d'Alsace pour remonter l'ensemble des déchets», a annoncé la préfecture. Si l'expertise conclut que le déstockage pourrait prendre moins de temps, la donne pourrait changer. Mais en cas de confinement confirmé, le ministère souhaite «une période de surveillance in situ pendant quelques années». Façon d'admettre de possibles défaillances.